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Interview de Jean-Laurent Del Socorro

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Nous avons eu la chance d’avoir entre nos mains Bouddica, un roman historique teinté de Fantasy. Et comme Jean-Laurent avait un petit peu de temps à nous consacrer, nous nous sommes engouffré dans la brèche pour lui poser quelques questions.

Bonjour Jean-Laurent. Avant toute chose, accepterais-tu de te présenter à nos visiteurs ?
Bonjour. Je suis auteur de science fiction et de fantasy historique. Ma première nouvelle « La Mère des mondes » a été publié en numérique aux éditions Le Bélial’ (où elle est toujours disponible gratuitement en téléchargement : https://www.belial.fr/jean-laurent-del-socorro/la-mere-des-mondes). Mon premier roman Royaume de vent et de colères a été publié aux Éditions ActuSF, comme mon nouveau roman Boudicca. Enfin, je suis un gros lecteur, et un fan de jeux de société et de jeux de rôle.

Boudicca est, si je ne me trompe pas, ton second roman et toujours avec ce mélange Histoire / Fantasy : qu’est-ce qui te plait dans cette formule ?
Comme je suis un fainéant, utiliser un cadre historique m’évite à devoir inventer tout un monde imaginaire. 🙂
Plus sérieusement, j’adore utiliser la matière historique pour évoquer notre quotidien. Les personnages de mes romans sont très contemporains, dans leur dialogues, leurs problèmes, leur attitudes… La part de fantasy est légère, en demi-teinte, mais permet d’évoquer avec recul des sujets parfois difficiles à aborder de façon trop réaliste.

Mais tu as aussi publié des nouvelles : as-tu un format que tu préfères ?
Ce sont des plaisirs d’écriture mais aussi des contraintes différentes. J’adore les deux, même si objectivement, la nouvelle est un format plus exigeant. Ce qui conditionne le choix de l’un ou de l’autre, c’est la nature de ce que je veux écrire. Certaines idées sont faites pour être développée en nouvelle et pas en roman, et vice versa.
Et puis parfois, c’est la contrainte de l’éditeur. Quand on me commande une nouvelle pour une anthologie – en plus avec un thème donné – même si je sais que je vais en baver pour l’écrire, je me retrousse les manches et je me lance. C’est aussi une réalité du métier d’écrivain qui n’est pas toujours perçue par les lecteurs : on doit parfois se plier au jeu de la nouvelle… que l’on soit à l’aise ou pas avec ce format !

Revenons sur Boudicca : alors qui est Boudicca ?
Boudicca est une reine celte du premier siècle en Angleterre. Elle était à la tête du clan des Icènes, au sud de l’île. Une partie de son histoire nous est connue car les romains comme Tacite ou Dion Cassius l’ont cité dans leurs écrits. Et pour cause ! Elle a bien failli chasser les romains d’Angleterre ! Elle a rasé plusieurs villes (dont Londres) et on estime à 80 000 le nombre de morts qui ont découlé de sa révolte.
C’est un personnage historique fort. Elle a été remise en avant à la renaissance, sous le nom Boadicée, mais elle reste inconnue en France. C’est pourtant une femme politique et militaire d’envergure, qui est aujourd’hui une véritable légende synonyme de résistance et de révolte en Angleterre. Je voulais lui rendre hommage avec mon roman.

Lorsque nous lisons ton roman, nous sommes poussés à nous interroger sur la réalité de ce personnage… qui a réellement existé : est-ce que ta volonté était de pousser les gens à se questionner sur le personnage et à aller creuser ?
Complètement. La base historique est très forte, mais je revendique ce mélange de personnages réels et de fiction. Le plus drôle, c’est quand les lecteurs vont vérifier, ils sont parfois surpris de voir que des personnages qu’ils croyaient inventés ont en fait réellement existé ! C’est le cas de Chrétienne d’Aguerre dans Royaume de vent et de colères par exemple.

Boudicca a été une figure de la résistance celte face aux romains… après que les celtes aient accepté une forme d’assimilation au royaume romain : peux-tu nous dire plus sur cette période ?
Au premier siècle en Angleterre, l’empire romain est déjà présent sur l’île via le commerce. Des comptoirs sont installés sur la côte, les denrées transitent principalement depuis la Gaule qui a été conquise. Les familles nobles de l’île d’Angleterre profitent de cette situation. Ils apprennent à leurs enfants le latin, bénéficient des avancées techniques des romains…
Les clans celtes n’oublient pas la tentative de Jules César pour se rendre maître de l’île. Les celtes se méfient… et ils ont raison, car l’empereur Claude va tenter une nouvelle invasion, davantage motivée par des raisons politiques qu’économiques.

Je suppose que tu as du faire des recherches poussées sur cette période pour rendre ton roman au plus proche de la réalité ?
Si je travaille sur l’historique, je ne suis pas historien moi-même. Un archéologue spécialiste de l’époque a fait la relecture de mon manuscrit pour le vérifier et corriger mes erreurs. À la fin de Boudicca, je propose aux lecteurs une bibliographie partielle des sources que j’ai utilisées pour préparer le livre.
Mais attention, Boudicca reste un roman historique…  🙂

Nous voyons d’ailleurs la culture celte sous un angle peu connu (place de la femme, rôle des druides, Relations entre les clans, relations vis-à-vis des romains, sexualité, ..) : tous ces éléments décrits sont-ils « historiques » ou as-tu malgré tout pris quelques libertés ?
Là encore, c’est un peu un mélange de réalité et de fiction. Par exemple, dans quelques clans de Bretagne, il existait vraiment cette dichotomie famille royale/ famille personnelle. On épousait une reine avec qui on avait des héritiers, mais on conservait son épouse et ses enfants « de cœur ». Pour les druides, leurs rôles sont tellement complexes que je reste très discret sur eux en définitive. Enfin, quant aux relations romains-clans ou entre clans, je ne pense pas avoir trop trahi la réalité des faits dans Boudicca.
Sur d’autre point, j’ai effectivement pris plus de liberté. Sur la sexualité, j’ai voulu les Celtes très ouverts d’esprit. Je ne sais pas si c’était réellement le cas. Ce thème en particulier rejoint mes préoccupations d’écrivain : la défense de la liberté des préférences sexuelles, l’égalité homme/femme… Je veux proposer aux lecteurs des problématiques très contemporaines.

Ton premier roman, Royaume de vent et de colères, était lui aussi une histoire de rébellion : est-ce un moyen de dire que la rébellion est essentielle ?
Attention, Boudicca est une histoire de révolte, pas Royaume de vent et de colères. La république de Marseille est le cadre du roman. Royaume est d’abord le récit de quatre personnages qui essayent d’exister. S’il a un point commun entre les deux romans, c’est celui de la liberté individuelle, le droit d’être ce que l’on veut.
Quand à la rébellion, je ne sais pas si elle est nécessaire, mais la question de l’insurrection au sens plus large transparait assez fortement dans Boudicca. Quand faut-il suivre les règles et quand faut-il s’en détacher ?

Tu as reçu le prix Elbakin.net du meilleur roman fantasy français : qu’est ce que ça t’a fait ?
Une immense joie… et une grande pression pour l’écriture de Boudicca !  J. Je crois que sans ce prix Royaume de vent et de colères n’aurait eu le succès qu’il a connu.

Et le prochain roman, sera-t-il sur le même thème ?
Mon prochain texte devrait être un roman à plusieurs personnages, comme Royaume de vent et de colères, ayant pour cadre la guerre de Sécession. Je dis « devrais » car j’y travaille depuis un moment, mais la quantité de recherche que je dois y consacrer est toujours plus importante.
Et puis, cela reste entre nous, il n’est pas impossible que je revienne encore une fois dans l’univers de Royaume de vent et de colères…  🙂

Je te laisse le dernier mot :
Comme beaucoup de mes collègues écrivains, je ne vis pas (encore  🙂 ?) de ma plume. Heureusement nous sommes soutenus par les festivals, les médiathèques, les établissements scolaires… et bien sûr nos éditeurs. Je voudrais encore remercier les éditions ActuSF pour leur confiance, leur accompagnement éditorial et leur travail pour promouvoir mes romans. Je sais que c’est toujours un risque de signer le premier roman d’un auteur.
Je veux aussi remercier le Conseil régional et à la DRAC Auvergne Rhône-Alpes ainsi que l’agence pour le livre l’ARALD pour la bourse d’écriture qu’ils m’ont accordée pour Boudicca.
Et enfin, un énorme merci à vous, amis blogueurs et lecteurs. Au plaisir de vous rencontrer sur un salon pour échanger avec vous !


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