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Entends la nuit de Catherine Dufour

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Depuis quelques années maintenant, depuis 2009 pour être tout à fait précis avec Outrages et Rebellion, Catherine Dufour avait limité à quelques interventions notamment dans le recueil Au bal des actifs, demain le travail paru l’année dernière aux Editions La Volte. Cela ne veut pas dire que Catherine s’était éloignée de l’écriture, puisqu’elle a écrit L’Histoire de France pour ceux qui n’aiment pas çaLe Guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses ou encore La Vie sexuelle de Lorenzaccio, des titres donc hors SFFF mais qui reste à découvrir néanmoins.

Alors, quand je vois passer un petit message indiquant qu’Entends la nuit va paraître aux éditions L’Atalante, avec une couverture magnifique d’Aurélien Police, sous l’appelation d’Urban Fantasy, cela éveille mon intérêt, et une nouvelle fois, je ressors emballé de cette lecture.

N’ayant pas lu Twillight, je serai bien en peine d’être une caution sur le côté anti-Twillight  d’Entends la Nuit mais je n’ai pas de mal à imaginer que cette histoire d’amour compliquée entre un lord anglais dans le directoire d’une entreprise hi-tech et une petite employée tout juste débarquée  est l’apothéose de l’homme de pouvoir face à la femme “socialement” inférieure, entre le riche et le pauvre… Pourtant, j’ai quand même eu rapidement l’impression que la jeune Myriame reprenait la main sur la relation et cassait un peu cet aspect femme soumise au beau et étrange et intriguant lord…

C’est ce que les Anciens signifiaient par Diis Manibus Sacrum Locum. Non pas une pensée habitant une demeure, mais la demeure elle-même pensante.

Mais, il serait bien limitatif de ne voir que l’aspect parodique. Avec beaucoup du justesse, l’autrice nous décrit un monde du travail impitoyable, que nous percevons dès le départ lorsque la jeune femme se présente à nous avec une mère malade, un père qui a fui une partie de ses responsabilité et un diplôme qui ne lui sert pas à grand chose. Alors comme beaucoup, elle accepte le travail qu’elle peut, précaire bien sûr. Et dès le départ, elle comprend que rien ne lui sera épargné : son bureau vient de subir un dégât des eaux, et elle doit se débrouiller pour le rendre respirable. Les commodités ne sont pas avec un minimum de confort pour éviter que les salariés n’y passent trop temps, la hiérarchie directe a les dents qui rayent le parquet et ne sont que axés sur la productivité, aidé en cela par un système qui permet à tout à chacun de surveiller ses collègues (je vous laisse découvrir ce système).

Et puis, l’incroyable se produit : repérée (et dénoncée dans un premier temps) par Duncan, elle verra le tapis se dérouler pour elle CDI, logement, on en aurait presque la larme à l’oeil par tant de gentillesse… ou de condescendance ? Un moyen de faire comprendre à tous que le petit peuple est à la merci des chefs et par là même qu’elle est redevable. L’employé.e dépendante de son patron, à un point qui dépasse l’entendement et qui tombera amoureux du bellâtre…

Myriame, la chair et la pierre sont de vieilles compagnes. Depuis des millénaires, la chair modèle la pierre, la pierre abrite la chair. Elle prend la forme de ses désirs, protège ses nuits, accueille ses morts. Toute l’histoire de l’humanité est liée à la pierre.

Alors, vous vous demandez où se trouve l’élément surnaturel qui me fait parler de ce roman ? Il y a bien un autre monstre que le travail tel qu’il est décrit (bien que je ne suis pas sûr de savoir lequel m’inquiète le plus) : Duncan Vane n’est pas qu’un cadre de l’entreprise, il est aussi un mâne qui pourrait tuer la jeune femme d’un claquement de doigt, et cette possibilité reste bien présente dans l’esprit de la jeune femme. Cet esprit ancien va nous permettre de découvrir un Paris que je ne connaissais pas, faisant découvrir des cours, des tunnels, cimetières ou encore les catacombes moins connues… On sent l’amour de Catherine pour cette ville.

Ce roman est donc à l’image de son autrice, drôle et engagé… et donc immanquable !

L’Atalante (18 octobre 2018) –  La Dentelle du Cygne – 352 pages – 21,90€ – 9782841728756
Couverture : 
Aurélien Police
La chair et la pierre sont de vieilles compagnes. Depuis des millénaires, la chair modèle la pierre, la pierre abrite la chair. Elle prend la forme de ses désirs, protège ses nuits, célèbre ses dieux, accueille ses morts. Toute l’histoire de l’humanité est liée à la pierre.
Quand on a 25 ans, un master en communication, une mère à charge et un père aux abonnés absents, on ne fait pas la difficile quand un boulot se présente.
Myriame a été embauchée pour faire de la veille réseaux dans une entreprise du côté de Bercy, et elle découvre une organisation hiérarchique qui la fait grincer des dents : locaux délabrés, logiciel de surveillance installé sur les ordinateurs, supérieurs très supérieurs dans le style british vieille école.
Mais quand un de ces supérieurs s’intéresse à elle via Internet au point de lui obtenir un CDI et lui trouver un logement, elle accepte, semi-révoltée, semi-séduite…
Mauvaise idée ? Pas pire que le secret qu’elle porte.
Myriame est abonnée aux jeux dangereux dans tous les cas, et sa relation avec Duncan Algernon Vane-Tempest, comte d’Angus, décédé il y a un siècle et demi, est à sa mesure. Du moins le croit-elle.
Catherine Dufour, éprise de légendes urbaines, nous offre avec ce roman un « anti-Twilight » tout en humour et une ode à Paris bouleversante.
 


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