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Briser les os de Cassandra Khaw

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La collection RéciFs des éditions Argyll continue de s’enrichir de nouvelles auteurices. Ce septième titre, sous traduction de Marie Koullen et toujours superbement illustré par Anouck Faure, est sous la plume de Cassandra Khaw, malaysienne. Il est à noter qu’un deuxième titre, avec la encore John Persons, est déjà disponible : nous vous parlerons un peu plus tard de Chanter le silence.

Drôle de contrat !

John Persons est l’archétype du détective privé : habitant dans un quartier particulièrement pauvre, tout comme lui, un peu paumé, il fait partie de ces personnes légèrement en marge de la société. Il aura la surprise de voir débarquer au sein de son cabinet un jeune garçon qui ne lui demande pas moins que de tuer son beau-père. Une fois la surprise passée, il apprendra que le fils d’ouvrier cherche seulement à protéger son frère cadet, soumis au joug du père alternatif.

Quand je dis non, tu dégages. Ce que tu fais à l’esprit de quelqu’un et ce que tu fais à sa chair, c’est pas si différent, tu piges ? Tu ne t’empares pas de ce qui ne t’est pas donné. On se comprend ?

Pour autant, notre détective préfère se rendre sur place, dans un quartier plus que populaire. Tombant sur la mère de famille, il sentira toute la misère qui entoure le quator famillial… Justifiant peut-être la volonté de vengeance de l’aîné des enfants ! Cherchant l’homme-cible, il se rendra rapidement compte qu’au-delà de cette violence vis-à-vis des enfants, il est surtout une créature non terrienne.

Des monstres sur Terre

S’il comprend rapidement que l’origine du beau-père est extra-terrestre, c’est parce que lui-même n’est pas un simple détective. Nous le comprendrons très rapidement, il semble « habité » et a une forme de prescience qui lui permet de comprendre assez rapidement que quelque chose ne tourne pas rond. La violence est omniprésente et difficile de savoir qui sont les monstres dans ce maelstrom.

A chaque fois que je e trouve le courage de lui dire que je le quitte, il… il me convainc de pas le faire. Il me fait m’asseoir. Il me dit que je trouverai jamais de meilleure situation que ça. Et c’est vrai.

Tout au long de l’enquête, nous découvrons la misère humaine. La misère liée à un travail qui a mené à de grands combats sociaux, mais perdus. Une misère qui entraîne la violence… A moins que ce ne soit l’inverse ! Nous retrouvons les dominations : le conjoint sur la conjointe – et notamment sur la pression sociale -, les hommes sur les femmes, les parents sur les enfants. Une violence abjecte. Une violence quotidienne. Et le sentiment qu’il n’y a pas grand chose à faire.

Dans cet univers, plusieurs des personnages sont possédés, en premier lieu notre détective. Mais est-ce la raison pour laquelle la souffrance se répand ? Ou n’est-ce que notre humanité ?

Un récit très… olfactif et visuel !

Dans le récit de Cassandra Khaw, nous sentons le quartier. Nous sentons la misère. Une odeur poisseuse, une odeur oppressante. Une odeur qui prend à la gorge. Une odeur qui accompagne autant le détective que le lecteur. Cette ambiance est sombre, nous met mal à l’aise. On voudrait que ce soit des monstres, on espère aussi que ce mal pourra être vaincu.

Comme le montre assez justement la couverture d’Anouck Faure, il y a du mythe lovecraftien dans cette novella. Mais ne pensez pas tomber sur le grand Cthulhu himself, vous ne verrez – et encore pas tant que ça – que des subalternes, ces monstres du quotidien qui peuplent notre monde.

La narration se fait au travers de John, qui, jusqu’au bout du cliché du détective old school, va utiliser un vocabulaire en même temps désuet et loin de notre quotidien… Cependant, ça marche et ça rend d’autant plus immanquable ce titre.

Editions Argyll (Septembre 2025) – Collection RéciFs – 112 pages – 9,90 € – 9782494665941
Traduction : Marie Koullen (Anglais – Malaysie)
Titre Original : Hammers on bone (2016)
Couverture : Anouck Faure

John Persons est détective privé et son dernier job a tout du plan foireux : un enfant d’onze ans l’a engagé pour tuer son beau-père, un certain McKinsey. Après quelques recherches, il apparaît que l’homme en question n’est pas seulement abusif, toxique et violent (ce qui est déjà beaucoup !), c’est aussi un monstre venu… d’ailleurs.
Heureusement, John Persons n’est pas un simple détective. Familier des forces occultes, il a au cours de son existence traqué et anéanti des démons et des dieux.
En fait, le seul souci lorsqu’on affronte un vrai monstre, c’est de ne pas lâcher la bride de sa propre monstruosité.


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