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Interview : Arnaud Mousnier-Lompre

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Nous avons eu la chance de pouvoir interviewé récemment Robin Hobb et au vu de tout le bien qu’elle pensait d’Arnaud, on ne pouvait que lui proposer cette petite interview :), vous donnant une fois encore la possibilité de découvrir un traducteur.

Allan : Bonjour et merci d’avoir accepté notre invitation. Avant d’aller plus loin, pourrais-tu nous parler de toi ?

Arnaud : Eh bien, j’ai 46 ans, 3 enfants, 19 ans de crédit à payer pour ma maison, un jardin japonais à créer autour et 6 chats à mettre dedans.

Allan : Quel parcours conseillerais-tu pour devenir traducteur ?

Arnaud : Aujourd’hui, apparemment, il faut des diplômes, DESS et compagnie; mais ma principale recommandation serait de lire le plus possible de « bons » auteurs français (je veux dire avec un solide registre de langage) afin de s’imprégner de leurs tournures, vocabulaire, syntaxe, bref, de leur style. Traduire, ce n’est pas connaître la langue d’origine par coeur – il y a des dictionnaires pour ça; c’est connaître intimement la langue d’arrivée.

Allan : Quand tu traduis, n’as-tu pas peur de déformer ce que veut dire l’auteur ? Quels « gants » prends-tu pour ne pas dévier la pensée de l’auteur ?

Arnaud : Si, bien sûr; pour ma part, j’ai deux moyens pour limiter les dégâts: prendre contact avec l’auteur pour lui demander de préciser sa pensée en cas d’obscurité et me plonger dans son esprit au fur et à mesure que je traduis de façon à ressentir la manière dont il ou elle exprimerait en français ce qu’il ou elle a écrit en anglais. C’est un système qui prend du temps mais qui donne de bons résultats en ce qui me concerne.

Allan : A ce que j’ai pu noter de l’interview avec Robin Hobb, tu prends contact avec les auteurs au cours de la traduction : est-ce pour toi indispensable à la bonne traduction, ou est-ce plus pour le « plaisir » de pouvoir discuter avec l’auteur ?

Arnaud : Non, ce n’est pas indispensable; tout dépend du type de livre que je traduis. Par exemple, j’en suis au 5ème volume de la série Traquemort pour L’Atalante et je n’ai pas pris une fois contact avec Simon Green, parce que ses bouquins sont des space operas délirants à but principalement de détente (et néanmoins très bons). De mon point de vue, il n’est pas nécessaire de chercher le sens caché de ces livres; il faut surtout rendre le côté dingue, vif, marrant, explosif des aventures, et c’est surtout une question de style, non de sens.

Dans d’autres cas, où le sens a une importance cruciale, comme avec Robin ou Orson Scott Card, je joins souvent les auteurs pour discuter de telle situation ou telle tournure de phrase afin d’être sûr de ne pas me planter; de là, de véritables rencontres peuvent avoir lieu.

Allan : J’ai pu noté que ta relation avec Robin n’est pas resté uniquement professionnelle et qu’une réelle amitié s’est créé : ca doit faire plaisir que son travail soit reconnu par l’auteur, non ?

Arnaud : En effet, c’est un grand plaisir et un grand honneur, d’autant que, comme tu dis, une amitié s’est créée; nous sommes passés d’une relation d’auteur à traducteur à une relation d’humain à humain à laquelle j’attache une immense importance. Robin est quelqu’un de très riche, très profond et en même temps très abordable, et nous partageons beaucoup de points communs qui enrichissent encore le travail que j’effectue sur son oeuvre.

Allan : D’ailleurs, cela ne te frustre-t-il pas trop quand on parle du style et du langage de l’auteur en sachant que tu y es pour une grande part ?

Arnaud : D’un côté, oui, parce que je reste dans l’ombre, mais d’un autre, non, parce que c’est un hommage indirect à ma traduction; de toute manière, je ne suis pas très à l’aise sous les feux des projecteurs, donc ça me convient. En outre, grâce à Internet, j’ai un retour sur mon travail beaucoup plus considérable qu’à l’époque où je bossais seul dans mon coin, et le site des Rivages Maudits, consacré à Robin Hobb, y est pour beaucoup. Merci à tous ses membres!

Allan : Comment t’y prends-tu pour traduire : une lecture intégrale suivie par la traduction ; traduction littérale puis amélioration de la traduction ?

Arnaud : Lecture intégrale, traduction au petit poil et une relecture pour peaufiner le tout.

Allan : Alors, cette question doit te revenir souvent, donc je vais la tourner de façon à ce que ce ne soit pas une atteinte au métier de traducteur : le fait de traduire des romans écrits par d’autres n’entraîne-t-il pas chez toi un désir d’écriture ?

Arnaud : Si, mais très informe et brumeux; si un jour il se précise, je m’y mettrai. Mais pour le moment mon vrai talent porte sur la traduction et je m’en contente.

Allan : Quelle est la question que l’on te pose souvent et qui a le don de t’exaspérer ? Tu veux y répondre une bonne fois pour toute ?

Arnaud : Il y a pas mal de questions qui reviennent, mais aucune qui m’agace particulièrement; curieux de nature moi-même, je trouve normal que d’autres m’interrogent sur mon boulot, relativement mal connu, et je me fais un plaisir de leur répondre, même si j’ai déjà donné dix fois la réponse.

Allan : Par contre, tu as bien une question qu’on ne t’a jamais posée et à laquelle tu mourrais d’envie de répondre ?

Arnaud : Echangeriez-vous votre baril de Robin Hobb contre deux barils d’un autre auteur?

La réponse, à l’étonnement général, est non.

Allan : Quels sont tes projets ?

Arnaud : Pour l’instant, aller nourrir mes chats, terminer de planter ma haie de bambous, continuer à traduire les bouquins de Robin… J’ai tendance à vivre au jour le jour.

Ah si! Essayer de sauver la planète en employant le plus de systèmes écologiques possible et en éduquant mes enfants dans ce sens.

Allan : Nous as-tu rendu visite et si oui, que penses-tu de Fantastinet ?

Arnaud : J’ai visité le site en diagonale et ce que j’ai vu m’a beaucoup plu: complet, pluraliste, attrayant, sympa. Du beau boulot, à première vue. Faudra que je refasse une visite plus approfondie.

Allan : Un petit mot pour la fin ?

Arnaud : Merci de m’avoir invité – et d’avoir eu la patience d’attendre la réponse à ton interview 🙂


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