Réalisée par :mail
Date :mars 2005
Alors voilà, jai lu Sunk et devant le déluge de rire qui ma assailli durant la lecture, je nai pu mempêcher de prendre contact avec les auteurs afin de tenter de percer le pourquoi, le comment et le dans quel but ? de cette oeuvre à lhumour ravageur…
Allan : Alors, on va commencer par les questions classiques concernant ta bio : Fabrice qui es-tu ?
Fabrice : Si je le savais, vieux
Non, vraiment, je ne suis pas en mesure de texpliquer. Par contre, je peux te dire ce que je fais : jécris, voilà. Des livres pour adultes, des livres pour ados, des scénarii de BD. Je crois quon peut dire que cest mon petit travail.
Allan : Quels auteurs de limaginaire sont à bannir à ton avis de peur de se retrouver plongé dans une réalité qui nous dépasserait ?
Fabrice : Moi. Sérieux : je naurais pas envie de vivre dans certains de mes livres. Ça doit être pour ça que je les écris, tiens. Mais attends, je ne suis pas sûr de bien comprendre ta question. Tu veux des noms dauteurs à bannir ? Ceux à qui je pense se sont déjà bannis eux-mêmes. Je ne sais pas, moi. Christine Angot ?
Allan : Le premier livre que jai lu de toi (et probablement pas ton premier) est A Vos souhaits et déjà jétais impressionné par le côté burlesque des situations, les clins dil à lhistoire / actualité et par le fait que les héros sont tout sauf des héros : alors question fatidique : combien de temps te prend lécriture dun livre ?
Fabrice : Entre deux mois et quatre ans. Plutôt un an, en fait, un an tout compris : de la première idée à la relecture des épreuves.
Allan : Arrives-tu à vivre uniquement de ton art ?
Fabrice : Non. Je me prostitue aussi. Mais pas beaucoup. Et sous un faux nom. Sinon, eh bien, je vois au jour le jour. En fait, la question nest pas de savoir si moi jarrive à vivre, parce que sur le papier, je nai besoin que dun tatami et dun bol de riz, et encore. Le problème sénonce plutôt comme suit : suis-je capable de contribuer équitablement aux revenus du ménage et, subséquemment, de ne pas éclater en plein vol ? Je réponds oui. Pour linstant.
Allan : Ce mois-ci ton actualité est marqué par la parution avec David Calvo de Sunk donc je reprendrai de ce côté les questions que jai posé à David (mais pas de triche hein ?). Peux-tu nous dire comment tu vois ton co-auteur ?
Fabrice : Comme un garçon qui souffre. Comme un garçon qui a envie. Comme un garçon prêt à tout. Lordre importe peu. Personne ne connaît David comme je le connais. Enfin, pas grand monde. Le côté, ah, ah, il est trop fou, cest pas ça, non, pas ça du tout. David est un type qui se débat, et cest très beau à regarder et, la plupart du temps, ça donne des résultats très intéressants. Repose-moi la question demain et je te ferai sans doute une réponse totalement différente, mais pas tout à fait.
Allan : Ce nest pas la première fois que vous travaillez ensemble mais cest votre premier roman ensemble : un projet qui vous trottait depuis longtemps dans la tête ?
Fabrice : On a écrit Atomic Bomb avant. Tu veux dire que ce nest pas un roman ? Tu as peut-être raison. Mais dans ce cas, je ne vois pas en quoi Sunk mériterait plus ce qualificatif. Sinon, oui, ça nous titillait vaguement depuis, je ne sais plus trop, sept ans ? Attention, je te rassure, on na pas fait que ça depuis 98, hein. On a skié aussi. On a réfléchi.
Allan : Cette uvre est de la fantasy humoristique : votre pari est en tous les cas réussi ; on se marre du début à la fin ! Où avez-vous été chercher ces dialogues ?
Fabrice : Mince alors. A la base, cest pas censé être drôle. Je veux dire, cest même tragique. Y a des gens qui meurent, putain. Des gens qui ont peur de la mort. Tu trouves ça drôle ? Cest que ça doit lêtre dans un sens. Nos vies sont tellement tordues. Je ne sais pas quoi te répondre au sujet des dialogues. On nest pas comme ça en vrai, en vrai on est gentils : tout le monde te le dira. On essaie des trucs. On se fatigue.
Allan : On aurait même limpression que lhistoire nest que secondaire
Fabrice : Quelle histoire ?
Allan : Les deux frères héros ont des personnalités radicalement différentes qui rend lun très sympathiques et lautre à baffer : mais pourquoi est-il si méchant ?
Fabrice : Parce que cest moi. Je suis comme ça. Je sais, ça contredit complètement ce que je viens de raconter quelques lignes plus haut, mais désolé, cest vrai. Je naime pas les gens qui geignent. Je naime pas les gens en général, et encore moins les magiciens. Les magiciens sont des inadaptés chroniques. Ils pompent lénergie des autres. En plus de ça, quand je fais la sieste, jai des espèces de, comment expliquer ça ? Des flashs de mort, voilà. Ça me montre comment ce sera quand je ne serai plus là. Et franchement, ça ne me donne pas envie dêtre schizophrène. Alors merde. Jai le droit dêtre de mauvaise humeur.
Allan : Mais alors : leau monte ou lîle descend ? Tu peux nous donner le scoop ?
Fabrice : Je ne sais pas. Je nai jamais bien compris ce truc. Demande à notre éditeur.
Allan : Quel est le but recherché en publiant sous deux noms ?
Fabrice : Nous faire passer pour deux personnes alors quen définitive nous nen formons quune.
Allan : Noublions pas Arnaud Crémet qui donne à ce livre une dimension supplémentaire, en faisant un petit bijou
Lui avez-vous imposé les illustrations lui demandant ce que vous vouliez où vous vouliez ou lui avez-vous laissé libre cours ?
Fabrice : Non, non. Pas question de lui demander quoi que ce soit. Il est grand, Arnaud. Il est fort. Cest un type qui peut te briser en moins de deux. Nous faisons profil bas avec Arnaud. Nous lui offrons des fleurs. Nous lui payons des chocolats chauds. Gentil, Arnaud. Lui faire ce que lui vouloir. Sacré Arnaud quand même.
Allan : Quelle méthode avez-vous employé pour écrire Sunk ?
Fabrice : Je citerai simplement Richard Ashcroft : « Now the drugs dont work / They just make you worse ». Mais cest du passé tout ça.
Allan : Avez-vous dautres projets ensemble ?
Fabrice : Nous allons conquérir le monde. Si cest pas celui-là ce sera tant pis pour vous, mais on travaille dur dans notre tête, donc ça devrait aller. Oui, oui, on a toujours plein de projets, aucun souci là-dessus.
Allan : As-tu quelque chose sur le feu ?
Fabrice : Trois romans jeunesse, un roman adulte et trois BD. Tout ça est déjà signé, ensuite on verra bien, il ne faut pas trop sénerver.
Allan : As-tu eu le temps de venir nous visiter ; si oui, que penses-tu de notre site ?
Fabrice : Votre page daccueil pourrait être un peu mieux foutue. Cest où quon clique, hein ? Mais bon, vous postez des critiques bénévolement, vous êtes passionnés, vous allez vers les gens, alors qui je suis pour vous dire de faire ceci ou cela et plus si affinités ? Dores et déjà, il se passe bien plus de choses sur le web que dans la presse écrite. Continuez, je vous bénis.
Allan : Que peut-on te souhaiter ?
Fabrice : De mourir vieux mais en bonne santé dans une immense catastrophe planétaire instantanée pour mépargner la frustration de disparaître avant ceux que jaime ou la douleur très conne de les perdre. De vendre une fois un bouquin à 500 000 exemplaires et de trouver le courage de ne pas réécrire la même merde juste derrière. De ne pas décevoir.
Allan : Le mot de la fin sera :
Fabrice : “Je pense que nous sommes daccord, le passé est terminé.”
Cest joli, non ? Cest de Bush Junior.