Allan : Bonjour Jean-Louis, tu es connu notamment du fait du succès rencontré par la Trilogie des Elfes qui a d’ailleurs été réédité chez Pocket à l’occasion de la parution de la préquelle de cette trilogie, et pourtant rien ne te destinait a priori à embrasser cette carrière… Peux-tu nous parler de ce « passé » ?
Jean-Louis : Je ne sais pas si quoique ce soit destine qui que ce soit à écrire des livres ou à avoir du succès. J’ai suivi des études d’Histoire et de Philo, puis j’ai travaillé dans un journal, puis dans l’édition. Toujours dans l’écrit, en fait…
Allan : Quand on regarde tes débuts, tu as été éditeur puis on te retrouve liés à des ouvrages d’humour… Nous restons loin de la fantasy ?
Jean-Louis : Je suis toujours éditeur. C’est mon premier et mon « vrai » métier. J’ai créé il y a 20 ans les Editions Hors Collection suite au succès du Guide du jeune père, co-écrit avec Pierre Antilogus, puis j’ai dirigé le Pré aux Clercs et Acropole avant de fonder il y a un peu moins de deux ans les Editions Fetjaine dans le groupe La Martinière-Le Seuil. Ce n’est pas si loin de la Fantasy – j’ai publié chez Pré aux Clercs et Fetjaine de nombreux auteurs du genre, tant en romans qu’en livres illustrés : Robert Holdstock, Megan Lindolm, Stephen Donaldson, les 6 livres illustrés tirés des films du Seigneur des anneaux, les livres d’Edouard Brasey, les livres photo que je publie avec Sandrine et Jean-Baptiste Rabouan… Ca fait tout de même pas mal.
Allan : Et puis arrive l’écriture et le succès que l’on connaît de ta trilogie des elfes : peux-tu nous expliquer la génèse de cette histoire et l’effet qu’a produit sur toi le succès ?
Jean-Louis : La genèse de l’histoire est toute simple. Après des années de succès des « guides » humoristiques écrits avec Pierre Antilogus, nous avons ensemble décidé d’arrêté, parce que nous étions allés au bout du genre. Je me suis trouvé un peu désŒuvré et j’ai retrouvé quelques pages écrites à l’époque où je jouais aux Donjons et dragons avec des amis et inspirées de l’un des scénarios que nous avions joué. J’ai essayé de mettre un peu de chair autour de tout ça et j’ai montré quelques pages à Belfond, qui a bien voulu tenter l’aventure.
Ca partait en fait d’une façon assez simpliste, mais en cours d’écriture j’ai tout changé en y ajoutant une dimension spirituelle et mythologique. Ma femme Florence m’a beaucoup poussé dans ce sens, heureusement.
Quand au succès, c’est quelque chose d’assez abstrait, dans l’édition. Tu peux vendre des centaines de milliers d’ouvrages, personne ne te reconnait dans la rue, tu sais. Donc c’est loin de changer quoi que ce soit. Sauf qu’on n’a pas de problème a être édité et donc à continuer d’écrire, ce qui est déjà énorme.
Allan : Le cycle suivant semble plus tenir du roman historique que du roman fantasy, ce qui ne l’empêcha pas d’être primé aux Imaginales… Doit-on voir dans tes diplômes en histoire médiévale une passion certaine pour l’histoire ?
Jean-Louis : Oui, bien sûr. Mais dès le départ j’essayais d’écrire dans un contexte historique quin soit cohérent et qui corresponde au Haut Moyen-âge, c’est à dire la période suivant la chute de l’empire romain. J’y suis en fait resté fidèle au fil des livres. La série sur Merlin se passe vers l’an 570, époque où Frédégonde et Brunehilde, les héroïnes des « Reines pourpres » régnaient dans ce qui deviendra la France.
Allan : Tu as participé aussi à des livres illustrés, quel était pour toi l’intérêt de la démarche ?
Jean-Louis : J’ai travaillé tout d’abord avec Jean-Luc Boivent pour un livre de photos, La Forêt de Merlin, utilisant de façon poétique et diffuse l’infographie pour restituer l’atmosphère d’une Brocéliande telle qu’on la rêve. Ce livre est en quelque sorte le troisième tome de la série « Le Pas de Merlin ».
Puis j’ai rencontré Sandrine et Jean-Baptiste Rabouan, avec lesquels on a travaillé sur un registre plus léger, plus souriant. On a publié deux magnifiques ouvrages sur les fées, les elfes et les lutins : Le Petit Peuple, au Pré aux Clercs, puis Au pays des Fées, chez Fetjaine. Ensuite, nous avons ensemble conçu toute une série de livres pour enfants de 6-10 ans, dont j’écris les textes et qu’ils illustrent. Ce sont vraiment des livres que j’adore. Sur La Petite fée paresseuse, c’est ma fille aînée Justine qui pose. Sur Le lutin qui volait les chaussettes, c’est ma deuxième fille Eloïse… On en a publié six, comme ça, chez Fetjaine.
L’intérêt est d’élargir le spectre, part rapport à l’écriture, et de proposer aussi un univers visuel. Avec la petite collection, l’intérêt est bien sur d’écrire des contes pour enfants.
Allan : Et maintenant Lliane, premier volume d’un nouveau cycle sur les Elfes, dans l’univers que vous avez déjà abordé : pourquoi maintenant?
Jean-Louis : Je n’ai pas pu aller au bout des « Reines pourpres », malgré leur succès, à cause d’un différent avec le responsable de la maison d’édition. Je n’avais pas envie de continuer la série ailleurs. J’avais envie de tourner la page et retrouver un peu de fraîcheur. Je connaissais bien Univers poche et Fleuve Noir, j’aime bien les gens qui y travaillent, on est donc partis ensemble sur quelque chose de nouveau.
Allan : Il s’agit en fait d’une préquelle (NdW : l’histoire se déroule avant la Trilogie des Elfes) ; cette tendance tend à se répandre ces derniers temps… Quel est à ton sens l’intérêt de raconter ce qui se passe avant ?
Jean-Louis : C’est un exercice assez exigeant – car il ne faut pas faire d’erreur – mais très intéressant pour l’auteur, parce qu’il permet d’approfondir les personnages. Lliane, l’héroïne principale du Crépuscule, est ici une jeune elfe insouciante, bientôt plongée dans une série d’épreuves qui en feront le personnage qui apparaît plus tard, reine et guerrière, à la fois extrêmement séduisante et extrêmement dangereuse.
Allan : Nous voici donc aux prémices des aventures qui lieront hommes et elfes… Nous avons un « duel » entre les religions anciennes et polythéistes – dont les elfes sont les représentants – et la nouvelle religion prônée par les hommes, qui nie totalement l’existence des elfes. Est-ce que les hommes sont responsables de la disparition des êtres de faerie ?
Jean-Louis : C’est l’idée, oui, de la série Le Crépuscule des elfes. Et ça correspond à une réalité historique, transformée peu à peu en légendes. Non pas que des elfes en tant que tels aient existé au Haut Moyen-âge, mais parce que c’est l’époque où la religion chrétienne, devenue décadente à la fin de l’Empire romain, a trouvé un nouveau souffle, notamment grâce aux moines irlandais, et s’est lancé dans une véritable croisade contre les druides et une christianisation de masse. Dans l’imaginaire chrétien, les moines qui ont mené cette croisade deviennent des saints tueurs de dragons, dont la vie est racontée noir sur blanc dans les Vita. Ce qu’on appelle dragons étaient en fait des foyers culturels païens…
Allan : Ce premier volume va surtout nous permettre de mieux connaître les différents peuples elfes, et les relations entre hommes et elfes… Ne crains-tu pas que ce premier volume ne donne un sentiment de « déjà » vu à tes précédents lecteurs ?
Jean-Louis : J’espère qu’il y aura plutôt du plaisir à retrouver un univers qui leur ait plu.
Allan : D’ailleurs, conseilles-tu de commencer par ta première trilogie, ou l’ordre n’a finalement que peu d’importance ?
Jean-Louis : Il vaut mieux commencer par le commencement, c’est-à-dire par Lliane. Mais la première trilogie est une histoire en soi et donc oui, ça n’a finalement que peu d’importance.
Allan : Les chroniques des Elfes seront-elles une trilogie ?
Jean-Louis : Au moins. Mais mon idée est d’en faire plutôt une série, comme L’assassin royal, par exemple. Elle sera fatalement limitée, mais trois livres, ça me semble court. Je suis déjà au deuxième…
Allan : Quand pourrons-nous lire la suite ?
Jean-Louis : En janvier ou février 2009, sans doute.
Allan : As-tu d’autres projet en cours et si oui peux-tu déjà nous en parler ?
Jean-Louis : Je sors en septembre un nouveau livre pour enfants Les elfes d’Automne, avec JB et Sandrine Rabouan, chez Fetjaine. Un conte pour enfants illustrés de photos « réelles ».
Allan : Que peut-on te souhaiter ?
Jean-Louis : De vendre 100.000 ex et d’être adapté au cinéma… Merci, c’est gentil.
Allan : Le mot de la fin sera :
Jean-Louis : Byth utan unsmethe treow heard hrusan faest, hyrde fyres.
Vous n’êtes pas d’accord ?
Crédit Photo : ©Benjamin Didier
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