J’ai lu l’édition Folio Sf mais l’illustration de la première édition était vraiment jolie.
Gagner la Guerre met en scène Benvenuto Gesufal, un héros – au sens de personnage central- déjà utilisé dans un recueil de nouvelles « Janua Vera ». ce héros donc n’est pas vraiment taillé pour attirer la sympathie : assassin, homme de main au service de l’homme fort du régime, il inaugure ce roman par une belle saloperie alors que la guerre se termine. Dans un environnement mediterrannéen où une République-ville, Ciudalia, vient de battre un empire adversaire du moment qui ressemble un peu à l’empire Ottoman, dans une ambiance de cape et d’épée très renaissance, J.P. Jaworski brosse un portrait désabusé d’une classe politique qui se déchire les retombées économiques et politiques d’une victoire. Pion trimbalé au milieu de complots et petits arrangements, Benvenuto raconte ses aventures à la première personne en utilisant un vocabulaire splendide.
La fantasy est présente mais de façon relativement effacée, réaliste. Pas de merlin l’enchanteur ici, plutot des nécromanciens faisant leurs opérations magiques dans le sang et qui ressentent douloureusement leur magie.
Même si l’histoire n’est pas très riche en contenu (2 ou 3 rebondissements en 1000 pages, ce n’est pas un thriller) il est difficile de ne pas être charmé par ce roman tellement son écriture est belle. J’aurais aimé plus court car je n’ai pu m’empecher de décrocher par moment, un peu par ennui, un peu par inhabitude face à ce style d’écriture très fouillé.
Folio SF (27 janvier 2011) – 981 pages – 12.00€ – 9782070437412
Au bout de dix heures de combat, quand j’ai vu la flotte du Chah flamber d’un bout à l’autre de l’horizon, je me suis dit : « Benvenuto, mon fagot, t’as encore tiré tes os d’un rude merdier. » Sous le commandement de mon patron, le podestat Leonide Ducatore, les galères de la République de Ciudalia venaient d’écraser les escadres du Sublime Souverain de Ressine. La victoire était arrachée, et je croyais que le gros de la tourmente était passé. Je me gourais sévère. Gagner une guerre, c’est bien joli, mais quand il faut partager le butin entre les vainqueurs, et quand ces triomphateurs sont des nobles pourris d’orgueil et d’ambition, le coup de grâce infligé à l’ennemi n’est qu’un amuse-gueule. C’est la curée qui commence. On en vient à regretter les bonnes vieilles batailles rangées et les tueries codifiées selon l’art militaire. Désormais, pour rafler le pactole, c’est au sein de la famille qu’on sort les couteaux. Et il se trouve que les couteaux, justement, c’est plutôt mon rayon…
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