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Les gardiens d’Aleph-Deux de Colin Marchika

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Frédérick Howard, alphanaute émérite, est le seul homme a être revenu vivant de l’Aleph deux. Nul ne sait ce qui s’est passé et comment il a fait pour réussir à s’en sortir ; toujours est-il qu’il est reparu quinze après et qu’il semble doté de certains pouvoirs…
Le voyage dans l’espace est désormais possible grâce aux découvertes des deux frères Hendricks : Hendricks le Jeune ayant eu l’intuition de l’Aleph et son aîné ayant réussi à les démontrer sous formes de trois théorèmes. Il est donc possible de « plier » l’espace pour pouvoir envoyé des hommes à tous les coins de l’univers. Mais cela n’est certainement pas sans risque et il faut être d’une résistance mentale importante pour pouvoir résister aux terribles hallucinations provoquées par Aleph 1.
La seule entité autorisée à exploiter les voyages dans l’espace est l’académie formant les alphanautes ; et les expériences qu’elles mènent ne sont pas toujours très claires !
Toujours est-il que le voyage dans l’espace est en danger permanent et qu’il semble bien que les seuls à pouvoir le sauver sont Frédérick Howard et ses descendants…

Allan : S’il fallait résumer en un mot ce roman de Colin Marchika, on pourrait dire Mathématiques car il est clair que la passion de l’auteur pour cette discipline ressort dans son écrit. Je vois d’ici la tête de tous les profanes de la matière qui ont passé des heures à s’arracher les cheveux devant les équa diff (eh oui ! c’est bien de cela qu’il est question, tout est question d’équations différentielles !!), se lamentant par avance en se disant qu’ils ne comprendront rien à l’écrit. Détrompez vous !! Les mathématiques sont présentés ici sous un jour nouveau… Pas de super génie aux formules à rallonge mais plus des « intuitifs » ou des excentriques… Le premier a trouvé la solution pour voyager dans l’espace n’est-il pas un dernier de la classe ? Sid n’est-il pas totalement à l’ouest, cherchant l’équation calculant l’ondulation des cheveux ?
Et puis le livre, n’est pas uniquement mathématique, c’est aussi l’histoire passionnante d’un homme, revenu de très loin, qui ne désire qu’une chose c’est finir sa vie tranquillement mais qui verra sa famille en permanence mêlée à l’histoire du voyage spatial !
C’est aussi une histoire de guerre secrète que se livrent l’académie formant les pilotes et l’ONU ou encore les sociétés privées qui voudraient bien avoir l’autorisation de voler de leurs propres ailes.
Bref c’est une histoire comme on voudrait en lire plus souvent, bien construite, intelligente et bourrée d’humour… sans oublier les remarques plus « politisées » : la façon dont sont traités les cyborgs notamment…
Bon un petit reproche quand même, j’aurais bien aimé en savoir un peu plus sur la façon dont Frédérick Howards procédait pour agir sur l’Aleph deux ou un peu plus de précisions sur le paradis des Cyborgs : peut-être pour une éventuelle suite ?

Orcusnf : Colin Marchika aime les mathématiques, autant dire la science, et pourtant il s’est fait connaître par la fantasy. Un paradoxe qu’il assume pleinement en revenant, avec ce roman, à ses premières amours. Et il frappe fort, car « Les Gardiens d’Aleph-deux » est un de ces romans dont on a du mal à croire qu’il est bel et bien français. A tel point que je me suis parfois fait la réflexion que le traducteur était bon, que telle expression n’avait pas dûe être facile à adapter. Et pourtant, Colin Marchika est français…

Car oui, ce roman a un style anglo-saxon, que dis-je un style, la maîtrise et l’art d’écrire à l’américaine. Aurais-je vu Robert Charles Wilson sur la couverture ou Gregory Benford que je n’en aurais pas été le moins du monde étonné. Et pour tout dire, Colin Marchika fait mieux, il réussit à faire de ce roman une sorte de « Fondation », reprenant grosso modo les mêmes structures, une intrigue à peu près semblable. Et c’est peut-être tant mieux, car après l’échec du tandem Dunyach-Ayerdhal, après les refus répétés de Klein de se remettre à écrire, et après le niveau plutôt moyen ( à quelques exceptions près) du space opéra français, ce genre avait besoin d’un bon coup de pied au cul, passez moi l’expression, et je crois que nous tenons là le bon bout.

Un roman qui ressemble à « Fondation », l’oeuvre culte d’Asimov et de millions de fans, disais-je, et ce n’est pas exagéré. Nous avons l’académie Tsiolkovsky, l’école d’élite pour l’élite, dépositaire des plus grands savoirs, et du monopole le plus necessaire qui soit, celui de l’accès à l’espace. Or cette académie, si elle permet à la Terre de continuer à vivre en lui apportant les ressources indispensables à l’économie, est pourtant la cible de mille critiques, de procès incessants, de diffamations et d’actes malveillants. Le monde est au bord du gouffre et pourtant il continue d’assaillir son sauveur, certes pas toujours bien intentionné, mais son sauveur quand même. Et comme ci ça ne suffisait pas, les crises se succèdent. D’abord un génie prend la grosse tête et s’enferme dans les Aleph. Puis un cyborg se révolte et entraine d’autres cyborgs avec lui, et ainsi de suite. A chaque génération, l’académie doit affronter une grave crise qui remet en cause son existence. Et toujours, de près ou de loin, la solution vient du capitaine Howard, sorte de Hari Seldon de la conquête spatiale, qui depuis la maison où il s’est retiré, dissimule bien plus de choses qu’il n’y paraît. Heureusement qu’il reste des hommes ( et femmes) assez sensés pour reconnaître ses mérites et y recourir à chaque fois que le besoin s’en fait sentir. Et ainsi, l’académie parvient toujours à s’en sortir in extremis jusqu’à la prochaine crise.

De cette oeuvre se dégage une grande force, qui dépasse la simple ressemblance avec une autre oeuvre plus illustre. Que ce soit la présentation des protagonistes par le biais d’un portrait complet, d’une peinture de leur âme, qui nous les rend proches bien qu’ils soient généralement des êtres hors du commun ou grâce à un style plutôt descriptif, où le dialogue se fait rare pour n’en acquérir qu’une plus grande valeur, n’étant utilisé que pour faire avancer l’intrigue, « Les Gardiens d’Aleph-deux » est une oeuvre exigeante. Pas d’excès dans la narration, pas de surenchère ou d’extraordinaire, on pourrait presque lire le chapitre d’après dans ce qui a été dit précédemment, la situation évolue logiquement, tout est maitrisé, scrupuleux presque, les pages coulent sans qu’on s’en rende compte. Idem pour le côté très scientifique des explications, car l’on sent que l’auteur se retient d’en faire plus et nous livre finalement une version pédagogique de l’explication, et pourtant déjà ô combien incompréhensible pour le novice.

En conclusion, « Les Gardiens d’Aleph-deux » est un grand livre. Parfaitement maitrisé, doté d’une histoire propice au rebondissement sans excès, avec des personnages exceptionnels mais pas déshumanisés, qui parviennent même à nous surprendre vers la fin. Qui plus est, sorti peu avant « Le Goût de l’immortalité » de Catherine Dufour, il annonce déjà le renouveau de la sf française qui se faisait chaque jour plus sentir. Un space opéra à retenir, qui mérite plus de reconnaissance qu’il n’en a eu jusqu’alors.

Le Livre de Poche SF (Avril 2006)408 pages 8.00 € ISBN : 2-253-11548-7 Couverture : Manchu
Mnemos 2004377 pages 19.00 € ISBN : 9782915159271

Grâce aux équations du mathématicien Hendricks, l’humanité a découvert l’espace parallèle Aleph-un , permettant d’atteindre les confins de la galaxie. Mais la traversée d’Aleph est dangereuse. De nombreux vaisseuax disparaissent. certains pilotes en reviennent fous. Un jour, le vaisseau du capitaine Howard, disparu sans laisser de traces quatorze ans auparavant, se rematérialise en orbite de Mars. Les scientifiques et militaires de l’académie Tsiolkovsky comprennent alors que l’avenir de la Terre va être bouleversé. Car Howard a ouvert lesportes d’une dimension à peine concevable pour l’esprit humain : Aleph-deux. Lui et ses descendants semblent désormais dotés d’étranges pouvoirs…


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