Réalisée par :Face-à-Face
Date :Novembre 2007
Orcusnf :Bonjour Andreas, avant de parler de vos oeuvres, accepteriez vous de vous présenter un peu pour les lecteurs qui ne vous connaîtraient pas.
A.Eschbach :Bonjour, je suis né en Allemagne en 1959, jai fait des études daérospatiale, mais jai finalement travaillé dans linformatique jusquen 2000, année où jai abandonné mon travail pour lécriture et me suis installé en France.
Orcusnf : Vous êtes un des rares auteurs allemands à avoir été traduits en France, et surtout après presque vingt ans sans traduction majeure, quest ce que cela vous fait davoir été le premier dune renaissance de la sf allemande en france ?
A.Eschbach :Si jai été traduit en France, cest par pur hasard. Je me trouvais à Poitiers en 2000, au salon qui est devenu ensuite les Utopiales de Nantes, et cest donc là que jai rencontré les éditeurs de lAtalante. Ils se sont montrés très interessés par mes livres, et ont donc décidé de me publier en France. Sinon, je ne suis pas le meilleur auteur allemand, jai juste fait la bonne rencontre au bon moment.
Orcusnf : Mais votre traduction est bénéfique, puisque du côté français, nous en étions quasiment restés à Perry Rhodan !
A.Eschbach :(rires) Il faut dire que si je ne me trompe pas, on en est arrivé au numéro 2400. Mais ne vous y trompez pas, la sf allemande est plus diversifiée que ça, et il y a même de notables différences entre la sf de lex-RFA et celle de lex-RDA.
Orcusnf : Dailleurs, vous habitez en France, quest ce qui vous attire chez nous ?
A.Eschbach :Jai toujours rêvé de vivre en bord de mer, et en Allemagne, nous ne sommes pas très gâtés du côté mer. ( ndlr, le littoral allemand se trouve plus au nord que la région nord pas de calais) Alors que moi et ma femme étions en vacances en Bretagne, nous sommes tombés amoureux de cette région et avons décidé de nous y installer. En plus, comme mes droits dauteurs me permettaient de vivre de ma plume, jai bénéficié dune énorme liberté en ce domaine, un auteur peut habiter où il veut.
Orcusnf : Votre traductrice attitrée est Claire Duval, quels sont les liens que vous entretenez ?
A.Eschbach :Elle a été ma traductrice pour mes premiers livres traduits en France, mais elle ne lest malheureusement plus. La profession de traducteur est difficile et mal rémunérée, elle a préferée abandonner pour soccuper dune médiathèque en région parisienne.
Orcusnf : Pensez vous quil y a des différences fondamentales entre la sf en France et en Allemagne ?
A.Eschbach :Je ne sais pas, je ne me suis jamais vraiment interessé à la production française. Jai beau vivre en Bretagne, jai encore quelques difficultés à lire en français. Par contre, jai pu découvrir Pierre Bordage puisque les guerriers du silence ont été traduits en allemand en juin dernier. (ndlr, sous le titre Die Krieger der Stille)
Orcusnf : Vous ne sévissez quen science fiction pour le moment, pensez vous à changer de genre un jour ?
A.Eschbach :Pourquoi pas ? Tout est possible, les genres ne sont à mes yeux que des choses abstraites, qui permettent aux libraires de ranger leurs livres. Je considère que le plus important est lidée, après je me contente de la développer dans sa forme optimale, peu importe le genre auquel elle appartiendra.
Orcusnf : Doù vient lidée de lhistoire de des milliards de tapis de cheveux ?
A.Eschbach :Cest simplement un souvenir denfance. Quand jétais jeune, ma mère a entrepris de tisser un tapis, pas toute la journée comme mes héros, mais quand elle en avait le temps et lenvie. Ca a été quelque chose de très long, qui lui a pris environ dix ans pour un tapis de taille moyenne. Jen ai été marqué et ai pensé que tisser un tapis était quelque chose de très long, la tâche dune vie même, voire même de léternité.
Orcusnf : Pourquoi choisir une histoire sous forme de nouvelles ?
A.Eschbach :Par inexpérience, car à mes débuts, je me sentais incapable décrire un roman, alors que la nouvelle était une forme plus accessible, moins insurmontable. Jétais capable décrire des nouvelles, pas un roman. Heureusement, jai réussi à surmonter ce handicap comme vous avez pu le constater.
Orcusnf : Dans station solaire, les pirates ont un prétexte écologique mais usent de la violence, est une tentative pour dénoncer les extrémismes des écologistes ?
A.Eschbach :Lextrèmisme est partout, toute idéologie est dangereuse même quand, comme dans le cas de lécologie, elle répond à des objectifs nobles.
Orcusnf : Pensez vous que la conquête de lespace est utile à lhomme ?
A.Eschbach :Avant, jaurais répondu oui sans hésiter, probablement de par ma formation scientifique. Mais aujourdhui, jai pu me rendre compte quil y avait de plus en plus dobstacles rendant difficile, voire presque impossible, la conquête de lespace, du moins à court terme. Pour prendre un exemple, on ne sait pas encore comment protéger des radiations les astronautes qui devraient partir vers Mars, et qui durant le trajet, ne seront plus protégés par une atmosphère aussi dense que celle de la Terre.
Orcusnf : Pourquoi lIrlande comme décor du dernier de son espèce ?
A.Eschbach :Un peu comme pour mon installation en Bretagne, jai eu le déclic pendant des vacances que jai passé en Irlande. Dans la ville où se passe le roman dailleurs. Et puis même si le héros était un soldat américain, je navais pas envie dy situer laction. Alors en fait je suis entré dans une librairie, et jai découvert un rayon intégralement consacré à la généalogie. Car cest un sujet très important en Irlande, doù sont partis des millions de gens au 19e siècle à cause de la pauvreté. Et maintenant, les irlandais dAmérique reviennent au pays et ont envie de savoir doù vient leur nom, où habitaient leurs ancêtres, ce genre de choses. En voyant ça, jai eu comme un éclair de génie, et ai imaginé un soldat américain dorigine irlandais qui se réfugierait dans son pays dorigine. Javais beaucoup didée à cette époque, mais celle là a été la bonne.
Orcusnf : Serait ce la librairie ou Duane rencontre des membres de lIRA ?
A.Eschbach :Exactement, elle faisait aussi salon de thé, mais je nai pas rencontré de membres de lIRA par contre.
Orcusnf : Duane parait plus humain que les hommes eux mêmes, alors quil nen est plus vraiment un.
A.Eschbach :Pour moi lhumanité nest pas uniquement liée à lapparence physique. Cest aussi un état desprit.
Orcusnf : Peut on dire quil sagit dune sorte de héros comme celui de Matheson dans je suis une légende, avec sa vie remplie par la routine et la solitude ?
A.Eschbach :Jai peu lu Matheson, mais un ami ma fait remarquer quil ressemblait assez à un personnage de Kafka, ce que jai pu constater aussi par la suite.
Orcusnf : On vous retrouve aussi au rayon jeunesse avec la série “Le Projet mars”.
A.Eschbach :Oui, on ma demandé si jétais capable décrire pour la jeunesse, et je lai fait. A travers cette série, jessaye de rendre hommage à une auteure qui a baigné mon enfance, Enid Blyton.
Orcusnf : Quels sont vos projets en cours ?
A.Eschbach :Mon dernier livre est en cours de traduction. Il sappelle “Ausgebrannt” (ndlr, littéralement épuisé) qui raconte les problèmes rencontrés par lHumanité lorsque, du jour au lendemain, les puits de pétroles se tarissent. Il devrait paraître début 2009, et je nai pu mempêcher, en rencontrant aux Utopiales Jean Marc Ligny, détablir un parallèle avec son livre Aqua Tm, qui devrait être prochainement traduit en allemand.
Orcusnf : Un mot pour la fin ?
A.Eschbach :SF is not dead