Le travail est une problématique au cœur de nos vies et des économies : Chômage de masse et plein emploi, uberisation, automatisation, marginalisation, … sont des thèmes qui reviennent en permanence au devant de l’actualité, notamment en cette période d’élections…
Pour l’occasion 12 auteurs de Science-Fiction ont mis leur plume au service de ce sujet… Pour notre plus grand plaisir !
- Pâles mâles de Catherine Dufour : Evette, jeune femme pleine de bonne volonté, se sent un peu victime de la poisse. Elle se bat pour trouver les petits boulots qui pourront lui payer son loyer pour la prochaine journée. Elle vit avec Adzo, qui lui vient de décrocher un sacro-saint CDD. Dans cette première nouvelle, Catherine met la barre très haute en montrant un avenir où la précarité s’est énormément développé du fait d’une uberisation de l’emploi. Evette va devoir cumuler des emplois très différents, s’appuyant sur une multiplication des formations de pointe, pour finalement toujours se poser la question de savoir si elle aurait encore le moyen demain de payer son loyer.
Tu sais bien que Flexemploi bourre les urnes d’offres en carton pour que le gouvernement puisse gémir qu’il y a cent millions de jobs en attente, traiter les chômeurs de feignasses et refuser de verser les allocs – Catherine Dufour
- Canal 235 de Stéphane Beauverger : Anton rentre chez lui, et semble avoir été reconnu une nouvelle fois… Pas facile d’être au centre de l’attention parce qu’il a gagné un procès durant laquelle il a attaqué une femme pour viol alors même qu’il a accepté de voir sa vie étaler au grand jour à la télé… La TV réalité et la façon dont celle-ci enferme les « invités » dans un carcan, les soumettant à leur totale volonté est au coeur de l’histoire. Le travail est ici déformé, restreint à la seule activité de partager sa vie privée…
- Nous vivons tous dans un monde meilleur de Karim Berrouka : Jason est contrôleur chef au service des transgressions et projets contre-sociaux et reçoit suite à dénonciation une femme qui pourrait être coupable de syndicalisme… Le récit de Karim Berrouka nous pousse dans un futur où le syndicalisme est montré du doigt et surtout la démonstration d’une attitude antisociale qu’il convient de dénoncer à tout prix. Tout est fait dans le monde à base de promotion, à la méritocratie. Mais quelles règles permettent de contrôler que tout est fait conformément aux engagements ? C’est peut-être là une preuve de l’intérêt de ce contre pouvoir… Une histoire très bien ficelée !
L’histoire n’est pas souhaitable, car elle est le témoin d’une évolution. Or, un système parfait ne peut évoluer. Nous n’avons pas d’histoire, parce que ce monde est parfait… Karim Berrouka
- Vertigeo d’Emmanuel Delporte : Il faut continuer la poussée, il faut continuer, toujours plus haut, malgré les pertes, malgré la fatigue. Cette Poussée est indispensable depuis que le monde a chuté… Le Palier 50 doit être atteint… Les morts permettant aux vivants de poursuivre à contruire les tours. Cette nouvelle est probablement celle qui m’a mis le plus mal à l’aise. Les ouvriers construisent de plus en plus haut sans en connaître réellement la raison mais soumis à une tyrannie de leurs responsables qui les poussent jusqu’à la mort à faire toujours mieux. La chute de la nouvelle (au-delà de celles des différents « monteurs ») jette un froid sur le monde du travail et reflète, dans une version bien sûr plus extrême, le monde actuel.
- La Fabrique de cercueils de L.L. Kloetzer : Cette nouvelle de L. L. Kloetzer nous fait plonger dans la toute puissance des multinationales. Alyn travaille à la chaîne, comme d’autres servants humains, pour s’assurer que des individus puissent être envoyé dans l’espace… Dans des cercueils. Une version bien extrôme là encore du travail à la chaîne.
- Alive de Ketty Steward : Claude suit un entretien d’embauche avec Pierre-Henri F. pour un poste pour coacher et activer des travailleurs. Comment s’assurer que les chômeurs fassent le nécessaire pour rester employable ? Alive nous permet de découvrir une vision de plus en plus sombre de cette « cotation » des personnes qui permettent d’identifier ceux qui sont encore dans le circuit et ceux qui ne le sont plus.
- CoÊve de Norbert Merjagnan : dans un monde où tout est coévaluation, Ganz Ore fait partie des rares à ne pas avoir d’évaluation et à en etre satisfait. Vivant de petites cotations, il va se retrouver mêler à une lutte de pouvoir avec le créateur de CoÊve. Dans cette histoire complexe, nous suivons un non-coté alors même que tout est à base de cotation (selon 4 critères). Nous voyons rapidement les limites de la mesure du travail par l’apport individuel, surtout lorsque cette « mesure » est ici d’une forme de virtualité. La progression de CoÊve et sa généralisation dans le monde ne peut que faire penser à la généralisation des outils Google… Avec nous l’espérons, un résultat différent.
- Le Profil de Li-Cam : La disparition du travail n’a pour autant pas fait disparaître les grands groupes qui ont trouvé une autre forme de pouvoir pour conserver et pousser à la consommation. Les corporations sont devenus des clans qui cherchent à appâter le chaland et garder la main sur la consommation.
- Serf-Made-Man ou la créativité discutable de Nolan Peskine d’Alain Damasio : Les stagiaires sont ici à l’honneur dans un contexte où à nouveau le travail à disparu. Sur une période de 16 mois, les stagiaires devront travailler en équipe (de 3) mais seuls l’un d’eux sera recruté… La lutte va être acharnée ! La critique sous-jacente est orienté vers certains processus de recrutement où des groupes mettent une concurrence effrenée entre les différents « profils » pour s’assurer d’avoir le meilleur… Mais si l’un d’eux ne jouait pas réellement le jeu ?
- Miroirs de Luvan : Martha a la responsabilité de nourrir les enfants suivant un programme bien établi. Mais la notification pour le cinquième enfant la surprend : est-ce vraiment un enfant ?
- Le parapluie de Goncourt de Léo Henry : Nous suivons l’avancement d’une nouvelle au gré des retours qui sont faits à Léo Henry… Une nouvelle qui nous apprend sur la perception et l’accomplissement d’une nouvelle.
- Parfum d’une moufette de Sabrina Calvo : Un auteur se voit proposer de participer à une anthologie sur le travail.. Sabrina Calvo nous plonge dans un avenir où les éditeurs, en plus de payer une misère, se permettent toutes les libertés sur le texte d’un auteur… Au détriment bien entendu de la liberté de ton de l’auteur. Un avenir très sombre pour l’écriture (et nous supposons les autres formes d’art) soumise au joug de la censure et du marketing.
La Volte (Avril 2017) – 614 pages – 20.00€ – 9782370490346
Couverture : Stéphanie Aparicio
Automatisation, revenu universel, précarité, évaluation, fin du travail, intelligence artificielle, parité, uberisatin, valeur, burn-out, réalisation, progrès, révolution numérique, éducation, management, réputation… Douze fictions qui explorent les mutations du Travail qui vient