Bienvenue au paradis est le premier titre des éditions AEthalidès que je tiens entre les mains et il est à noter que la ligne éditoriale de cette maison d’édition est plus tournée autour de la poésie et de la philosophie… Donc avant de parler du roman en lui-même, je tiens à saluer l’éditeur pour cette ouverture d’esprit, et je relaies d’ailleurs son message indiquant que si vous avez un roman imaginaire avec un angle poétique et/ou philosophie, les éditions AEthalidès peuvent être intéressées :).
Maintenant, parlons de ce roman qui se situe à un peu plus d’un siècle d’aujourd’hui. La souffrance animale a été enfin prise en compte et hommes et animaux peuvent vivre sereinement, avec une modification de la chaîne alimentaire qui exclue la viande des repas… La victoire du véganisme en un mot, mais bien au-delà de ce que nous aurions pu imaginer puisque cela s’étend aussi au monde animal dans lequel il n’y a plus ni prédateur ni proie pour que nous puissions vivre dans la plus grande harmonie…
Ce monde que beaucoup de défenseurs des animaux espèrent ne va pas assez loin pour un certain nombre des futurs concitoyens de notre planète… Bien que loin des idées du Florwer Power, Dan, jeune étudiant, va se retrouver plonger dans le mouvement en voulant simplement répondre aux élans de son cœur. Qu’est-ce-que le Flower Power ? Tout simplement, un groupe qui lutte pour que nous arrêtions d’ignorer la souffrance végétales en nous en servant de base pour notre alimentation désormais non carnée. Et cette lutte, jugée fondamentale pour les membres, est considérée risible par les non-sensibles à la maltraitance végétale. D’ailleurs, certains des propos utilisés actuellement par les amateurs de viandes pour moquer les végans en indiquant que leur combat ne va pas jusqu’au bout (je pense au cri de la carotte), sont les mêmes qu’utiliseront les végans dans le futur pour moquer les Flower Power.
Bref, vous l’aurez compris, ce monde où la viande a disparu des assiettes n’est pas aussi riant que ce que nous pouvions imaginer… Dan joint donc le mouvement, sympathisant avec les membres humains et végétaux et va tout faire pour s’attirer les faveurs de la jeune femme… Une jeune femme envoûtante avec ces gènes de félins, une pratique devenue courante. Et la jeune femme n’a pas froid aux yeux !
Mais une vague d’inquiétude tourne autour des membres de Flower Power avec des disparitions surprenantes et étonnantes.
J’ai adoré ce livre qui allie énormément de qualité tout en restant léger et, il faut l’avouer, très drôle. Le personnage de Dan et cet amour inconditionnel, le rendant prêt à tout pour la belle Alice est un pur délice. J’ai savouré particulièrement la scène où il lui ai demandé de s’excuser à un arbre (argh, quel goujat je fait, je n’ai retenu ni son nom ni son espèce) et le décalage qu’il y a entre lui et le reste du groupe.
On pourrait penser que ce monde est parfait, mais nous nous rendons compte que les difficultés demeurent, notamment dans la façon de l’appliquer : le retrait de cet instinct a été fait sur les prédateurs, les rendant non violents, mais pas sur les proies qui étaient par définition des victimes et que nous voyons devenir des bourreaux.
L’auteur ne reste pourtant pas sur un niveau ironique, mettant aussi en avant différents faits autour des communications, collaborations et autres assistances existant entre les végétaux pour montrer que le discours n’est pas non plus incongru ou hors de propos. Nous voici donc questionné sur notre relation au vivant dans son ensemble.
Ce qui m’a fait m’interroger à un moment sur l’alimentation qui nous resterait, sachant que les Flower Power recommande les fruits… Mais ne trouveront pas un extrémisme derrière pour dire qu’il s’agit de consommer les enfants des plantes, ce que nous ne ferions pas avec les nôtres ?
Sans oublier qu’une dimension “Transhumaniste” fera son apparition aussi dans les réflexions proposées ici.
Bref, un roman que vous devez absolument découvrir, qui vous permettra de passer un excellent moment en montrant qu’un roman peut être tout à la fois de Science-Fiction, être poétique (parce que cette relation Dan / Alice) et philosophique (avec notamment le rapport au vivant).
Aethalidès (17 septembre 2020) – Freaks – 194 pages – 18€ – 9782491517052
2145 : la libération animale a eu lieu un siècle plus tôt, et l’humanité s’évertue désormais à transformer le génome afin d’éliminer la prédation et le conflit. A la suite de la résistance animaliste du siècle précédent, un nouveau mouvent éthique et frugivore, le Flower Power, accuse les végans d’être les infâmes prédateurs des plantes innocentes. Le paradis sur Terre est, pour celles-ci un enfer. Malgré son indifférence à la cause végétale, un jeune étudiant, Dan, intègre le mouvement pour se rapprocher de l’envoûtante Alice. Parviendra-t-il à se faire aimer d’elle ? Sa quête sera d’autant plus difficile qu’un autre groupuscule, plus radical, visant à délivrer tous les êtres vivants de la souffrance et le mort, s’oppose à la réalisation de ses projets amoureux. Du véganisme au transhumanisme, le réel réussira-t-il enfin à se transformer pour tous en véritable paradis.