Depuis quelques temps, la fantasy historique se développe, et Himilce, publié aux éditions Argyll, n’est pas le premier roman dans ce domaine qui fait la part belle aux femmes en mettant en avant celles qui sont restées un peu dans l’ombre des hommes, oubliées d’une histoire, malgré souvent un rôle important dans le cours des événements. Nous pouvons citer par exemple Jean-Laurent Del Socorro qui a signé cette année Morgane Pendragon même si les deux oeuvres ne sont pas comparables.

Emmanuel Chastelliere répare un oubli en nous racontant l’histoire romancée d’Himilce, qui fut la femme de Hannibal, le général aux éléphants.

L’Histoire connue…

Pour ceux, qui contrairement à moi, n’ont pas eu la chance de pouvoir faire du latin, ou ceux qui n’ont pas suivi des études d’histoire, les guerres puniques ne sont peut-être pas des plus évidentes, même si la légende du passage des Alpes par Hannibal avec des éléphants est relativement connue.

Les guerres puniques ont opposés à plusieurs reprises entre le IIIème et le Ier siècle avant Jésus Christ l’Empire Romain et la cité carthaginoise, comme bien souvent pour des questions de territoires. La première guerre punique a été remportée par les romains, laissant Carthage très affaiblie financièrement notamment, ce qui entraînera, comme souvent, une volonté de revanche.

Battant des paupières pour chasser le sang qui coulait de nouveau de sa propre blessure, elle vit avec horreur les bourgeons sur les branches d ela créature de pierre s’ouvrir lentement. Elle avait comme pris vie, sertie d’une couronne de lfeurs blanches, d’une blancheur aussi éclatantes que la neige la plus pure. L’apparition garda toutefois le silence et tomba à quatre pattes, s’approchant lentement.

S’assurant un certain nombre de soutien, notamment par son mariage avec Himilce, le général et chef de Carthage Hannibal Barca va donc lancer une offensive importante contre l’ennemie romaine. Sachant que sa femme pourrait servir de monnaie d’échange, Hannibal lui demande de partir pour Carthage où elle rejoindra le reste du clan Barca

… et celle extrapolée moins connue

C’est donc bien Himilce que nous allons suivre pendant tout le récit proposé par Emmanuel Chastellière, un roman qui va donc nous permettre d’en apprendre plus sur la cité carthaginoise qui reste pour beaucoup d’entre nous QUE l’ennemie de Rome.

Himilce se retrouve donc à Carthage où elle va rapidement faire la découverte de sa belle-famille et notamment de sa belle-mère, femme forte qui mène d’une main de fer la maisonnée, et la cousine de Hannibal, plus ouverte sur la société. Comme on s’en doute, l’accueil fait à Himilce n’est pas des plus chaleureux et il est intéressant de voir que la construction du roman s’appuie sur la place des femmes dans ces sociétés lorsque le mari, le père ou le fils sont à la guerre.

Peu sachante des normes et coutumes du pays, mais dotée d’une curiosité dans bien des domaines, nous allons au travers du regard d’Himilce et d’Emmanuel, la société carthaginoise dans toutes ses dimensions : la dimension politique bien entendu, qui sera le cœur des tensions entre belle mère et bru, mais aussi la découverte du mode de vie des habitants dans une société où beaucoup de choses manquent.

Le rythme du roman n’est bien entendu pas celui de la guerre, il est celui de la découverte d’une société que nous ne connaissons pas (tout comme le personnage central ne la connait pas), la découverte d’une femme qui ne veut pas se cantonner au rôle qu’on veut lui donner et qui souhaite exister pour que ce qu’elle est et ce qu’elle fait plus que comme “une femme de”.

Tous ces convives ne la voyaient pas. Ils ne posaient pas les yeux sur elle, n’attendaient rien de sa part. La jeune femme n’était qu’un lien vers Hannibal, une figure que la plupart d’entre eux n’avaient jamais rencontrée.

Emmanuel a su entourer Himilce de personnages forts et faibles à la fois : Bathsillem la belle-mère qui montrera sa force de caractère tout en nous laissant plus tard découvrir ses failles, la petite voleuse qui permettra de voir la zone plus floue de la société, et surtout Aspar, fidèle de Hannibal, affecté à la surveillance de Himilce et à la personnalité complexe entre volonté de combattre et blessure / fêlure de sa conscience.

La religion est présente aussi, une religion là encore où les femmes ont un rôle important comme cela sera visible par le personnage de la sœur de Aspar.

Un roman plus historique que fantasy

Le roman d’Emmanuel nous mène donc dans une période historique qui, bien que connue, ne l’est pas vraiment sous l’angle carthaginois. Le récit est prenant, intéressant et on sent le travail de recherche de l’auteur pour ne pas nous donner une mauvaise vision de cette société.

Le récit est clairement du récit historique, la dimension fantasy n’est qu’anecdotique (et d’ailleurs vous ne la voyez que si vous voulez la voir :)), ce qui n’est pas un problème tant le récit est intéressant.

Argyll (09 juin 2023) – 427 pages – 24,90 € – 9782492403446
Couverture : Xavier Collette

218 avant J.-C.
Entre Rome et Carthage, la guerre gronde de nouveau. Le prodige militaire Hannibal Barca se tient prêt à embraser la Méditerranée. Ainsi, lorsqu’il part pour l’Italie à la tête d’une armée, il laisse derrière lui son épouse Himilce.
À peine débarquée à Carthage, la princesse ibère est immergée dans les eaux troubles de rivalités féroces, à la merci des ambitieux et des intrigants. Elle doit alors se glisser dans le costume qu’on lui a préparé : celui d’une femme dévouée à sa nouvelle patrie, la mère du futur héritier.
Dans une ville tout entière tournée vers la guerre, la jeune femme devra-t-elle suivre le chemin tracé pour elle ? Se ranger du côté des voix de la discorde ? Ou tracer sa propre route, quitte à faire naître des inimitiés, même parmi les siens ?