La Messagère est le troisième roman de la collection imaginaire de Rivages après L’île de Silicium de Chen Qiufan et Immobilité de Brian Evenson. Comme les deux précédents de la collection, le roman de Thomas Wharton nous plonge dans un futur indéterminé, dans un monde où ce qui doit arriver arrive…

De la disparition d’Amery…

Alex est un concepteur de jeux vidéos, il est d’ailleurs intéressant de préciser qu’il contribue à créer un nouveau monde virtuel, dans lesquels toutes les espèces pourraient vivre sans difficulté. Pourtant, il va devoir faire un break d’une certaine façon car sa sœur a disparu et n’a plus donner de signes de vies depuis quelques temps maintenant.

Alex créé des mondes impossibles et nous, c’est ce monde-ci que nous rendons impossible.

Quand on sait que l’activité de la jeune Amery est loin d’être anodine, puisqu’elle va s’aventurer sur le territoire de River Meadows, et plus précisément sur le territoire “interdit” depuis l’accident de mine dans lequel est mort le père de la famille… Son objectif ? Sauver les animaux pris dans cet étrange zone, qui peut se retrouver au-delà du temps.

Alex repart donc sur les traces de sa cadette, qui fut une des victimes même si la raison n’est pas clair de la mine.

… à la découverte d’un nouvel élément

Progressivement, nous allons comprendre ce qui a amené Alex à s’éloigner de son lieu de vie, au travers des flashbacks qui vont nous faire découvrir une histoire incroyable.

Suite à différentes recherches, un nouveau minerai a été découvert, qui sera appelé “Fantômes”. Ces particularités en feront un minerai très recherché, à des valeurs qui dépassent largement la valeur de l’or. La présence d’une mine importante au Canada, la plus importante dans la zone de River Meadows, a poussé un certain nombre de familles à tenter l’aventure et a changé de vie.

C’est ainsi que la famille d’Alex et Amery se sont installés dans ce petit village qui n’aura de cesse de grandir. Mais, une des caractéristiques de ce minerai est étrange et induit ce qui sera appelé une “Trébuche” : les personnes se retrouvent dans une zone un peu floue, sans savoir ce qui s’est passée, comme si l’espace et le temps toussait. Les scientifiques sont formels sur le fait que cela n’est pas dangereux… Pourtant, cela aura une influence majeure sur la caractère d’Amery, qui développera des comportements de plus en plus étranges et la marginalisera.

De son côté Alex se souvient aussi de son amour de jeunesse, Claire, qui elle aussi tente de s’extraire de l’influence de River Meadows.

Une histoire belle et déstabilisante

Il est à noter que ce roman ne se laisse pas lire tout seul. Nous avons beaucoup de mal à voir le message de la fameuse messagère, à comprendre où tout cela mène.

Il y est bien sûr question d’écologie, avec la disparition de nombreuses espèces sur la zone de contamination et les tentatives désespérées d’Amery pour les sauver, la question autour de ces parcs naturels qui donnent bonne conscience tout en nous permettant de dézinguer à tout va par ailleurs. Il y est aussi question de rigueur scientifique, dans cette “assurance” qu’il n’y a pas de danger pour s’assurer que la dimension économique ne soit pas impactée.

Nous découvrons aussi une nature qui nous considère comme quantité négligeable, comme la cause de malheur bien sûr, mais dont la survie importe peu.

Je crois que c’est ce jour-là que je l’ai senti pour la première fois : l’existence, autour de nous, d’un univers entier qui se soucie de notre présence comme d’une guigne.

Le roman se déroule, et nous subissons, comme les protagonistes, les trébuches, sautant d’un temps à l’autre, d’un personnage à l’autre en cherchant à savoir où nous sommes.

Un roman étrange à découvrir pour sa poésie, et notamment la fin et cet oiseau qui nous raconte sa vie.

Rivages (Mai 2023) – 459 pages – 23 € – 9782743659943
Traduction : Sophie Voillot (Canada)
Titre Original : The book of rain (2023)
Couverture : Soren Solkaer

Alex a grandi avec sa sœur Amery dans une ville minière du Canada, River Meadows, où leur père travaillait dans l’extraction d’un gisement toxique avant que la zone finisse par être évacuée et condamnée. Des années plus tard, Alex part à la recherche de sa sœur, disparue au cours d’une expédition dans ce territoire interdit. Claire quant à elle, a échappé à River Meadows en devenant auteur de guides touristiques. Alors qu’elle est en mission sur une île qui ressemble beaucoup à l’Atlantide de Platon, une grue en voie d’extinction s’installe sur le balcon de sa chambre pour y faire son nid. Enfin, dans un futur ravagé par le dérèglement climatique, un oiseau raconte comment son destin s’est trouvé lié à celui d’Amery et au sort de l’humanité tout entière.