La collection eutopia de La Volte s’enrichit donc d’un nouveau texte cette fois-ci collectif, après que nous ayons pu découvrir un texte de Philippe Curval (Un souvenir de Loti), de Li-Cam (Résolution) ou encore Stéphane Beauverger (Collisions par temps calme). Comme le veut la tradition de cette collection, nous voici projeter dans un monde différent et eutopique – par opposition à dystopique.

Pourtant, ce texte m’a semblé bien plus étranges que les précédents, avec cette impression de vivre une expérience plus que de lire une histoire, une expérience qui nous donne un autre regard sur notre monde mais aussi sur ce que nous pouvons attendre d’une lecture…

Une marée verte !

C’est ainsi que nous pourrions résumer ce monde de demain, à contre-courant de ce qui nous est promis d’une certaine façon. Le monde est désormais hyper-végétalisé, les plantes et autres flores arrivent, par vague, semant le désordre, pouvant tout détruire sur leur passage et mettant en péril de fait les vies des hommes et femmes.

Quel est ton nom dans la marée ?

Dans ce futur végétal, si une partie de la population se terre dans des villes, luttant pour garder leur vie sédentaire, le groupe que nous allons suivre est un groupe de nomades, sans chef, courageux et téméraires, surfant sur cette nouvelle réalité pour vivre leur vie de façon passionnée et bordélique. Chacun des membres de cette communauté a son propre rôle, sa propre activité contribuant au bien être de la communauté.

C’est riant, c’est agité, c’est bruyant, c’est anarchique, c’est vivant surtout !

Chacun·e des membres de ce peuple est une partie de cette trame qu’ils et elles tissent tout au long de leur vie, tout au long de leur pérégrinations. Chaque aventure peut se conclure par la disparition, la mort, sans que cela n’arrête le groupe.

Nous allons donc suivre dans cette novella, le quotidien de ces nomades de la nature, dans leurs joies et déceptions, dans leurs combats aussi par moment, tentant de percer le secret de leur bonheur, que nous sentons percer à chaque page.

Le fond et la forme, tout y est !

Si le récit est cette tranche de vie du groupe, il est à noter que les personnages sont là, vivant·e·s entre les pages, entraîné·e·s dans leur quotidien au gré des marées et rendu·e·s attachant·e·s par leur simplicité, leur bon humeur et leur dynamisme.

Au-delà du fond, c’est surtout la forme qui est plaisante, accrocheuse, bourrée d’images à l’instar des “Sédenternes” qui représente ceux qui ne veulent pas suivre la vie nomade. Chaque phrase est ciselée, poétique, riche de nouveaux termes qui n’alourdissent pour autant pas la lecture.

Vous faites pas de bile ! Ils sont un peu fous : ils ne peuvent vivre qu’en marchant. Ils croient qu’en s’arrêtant ils vont prendre racine !

J’ai particulièrement apprécié le pas, le pas individuel qui peut se caler sur le pas du groupe le temps d’un bout de chemin ensemble, un temps que nous maîtrisons, que nous pouvons allonger ou raccourcir au gré de nos envies.

Un récit positif, mettant en avant le sens premier de la communauté, où chacun·e à sa place.

Un premier roman du collectif qui ne peut qu’en appeler d’autre.

La Volte (Juin 2023) – Collection Eutopia – 185 pages – 8 € – 9782370492197
Couverture : Coraline Charnet

Car nous avançons dans les zones fauves, à la lisière de l’habitable et au coeur du vivant. Chez les sédenternes, quand la marée verte arrive, on se calfeutre, on se protège et on prie. On répand la chaux partout dans les maisons. Les cuves de biogression s’ouvrent pour aspirer le chaos. Nous, on part à la chasse.

Sur des terres secouées par de violentes marées végétales aussi mortelles que fécondes, les trameurs forment une communauté nomade qui a pris le parti du cataclysme. Sans carte ni chef, seul leur Pas collectif les guide.