Dans le recueil de nouvelle d’Alexander Weinstein, les nouvelles technologies sont au cœur de chacune des nouvelles… Et si le nom du recueil vous dit quelque chose, c’est parce que la nouvelle After Yang a été adapté par Kogonada avec dans le rôle du père Colin Farell… Film qui a été sélectionné pour Un certain regard au festival de Cannes !
De l’avenir de notre famille…
Parmi les sujets qui sont les plus présents dans les nouvelles de l’auteur, la composition de la famille prend une place importante. Et comme de bien entendu, c’est une des thématiques principales de la nouvelle éponyme du recueil, Nos Adieux à Yang en français. Dans la famille dont il est question, la jeune Mika, d’origine chinoise, a été adoptée. De façon à lui faire découvrir l’histoire de ses origines, le robot Yang a été acheté. Au moment où nous rencontrons la fille, Yang tombe en panne et une grande partie de l’histoire va nous questionner sur ce que représente Yang : est-il un simple produit de consommation ou un membre à part entière de la famille ? Dans un monde où la question d’avoir un enfant se limite au choix de l’adoption, du clonage ou de la robotisation, Alexander nous propose une lecture de ce que pourrait être notre futur… Nous découvrirons aussi ce qui se cache sous les apparences, notamment au travers de l’interaction avec ses voisins.
Une des dimensions que nous trouvons aussi dans Nos adieux à Yang concerne le coût de la famille et notamment pour cette nouvelle le coût de la réparation ou réachat de Yang. Il sera aussi question de finances dans l’excellente nouvelle Heartland où l’échec du jeune fils poussera un père à trouver des solutions que nous pourrons juger choquantes : mais que faire quand les moyens ne sont pas là ?
Les deux premières nouvelles sur la famille sont déjà bien sombres, la troisième n’améliorera pas ce futur décrit puisque dans Les enfants du nouveau monde, les progénitures sont virtuels. Chacun·e peut se construire son monde dans un univers virtuel, évitant ainsi la gestion au quotidien… Mais lorsque l’option de sécurisation et antivirus n’est pas prise (dédicace à notre actualité), le risque de perdre beaucoup plus que son univers devient réel comme cette famille l’apprendra malheureusement. Un récit puissant et bien amené qui va, dans le même temps, chevaucher la thématique de la mémoire…
… à la gestion de notre mémoire…
Autre thématique présente, parfois à cheval sur celle de la famille comme je le disais plus tôt, la mémoire tient une bonne place… Cela commence par la nouvelle Les Cartographes dans laquelle, moyennant finance, deux jeunes vous construisent des souvenirs pour donner une histoire que vous souhaitez avoir mais n’avez pas. Le test des limites est cruciale pour s’assurer de la qualité du produit fini… Mais quel impact cela peut avoir sur la mémoire des testeurs ? Et quelles seront les conséquences pour les clients ?
Même si la thématique touche aussi l’hyper-connectivité, je glisserai la nouvelle Ligne de pente, qui m’a moins marqué, dans la dimension mémoire. Un skieur de l’extrême, dont chaque saut était partagé avec la population, a un accident qui l’exclut des circuits. Nous allons donc le suivre dans sa nouvelle vie et voir à quel point cette hyper-connectivité, liée à une mémoire numérisée, va le bloquer dans sa nouvelle vie.
Dernière nouvelle autour de la famille (liée à la scolarité) avec cette propension à se débarrasser du maillon faible dans La nuit de la fusée. Nouvelle courte et percutant, elle nous questionne sur l’éducation et le devenir de ceux qui n’y sont que peu sensible.
… ou autres sujets de la technologisation de notre société !
Le sujet de l’hyper connectivité prend tout son sens, et notamment dans son impact sur la vie privée dans la nouvelle Une histoire de la révolution qui a échoué. Je ne vous en dit pas plus, la nouvelle étant courte et je risque d’en dire trop. Virtuel et Education se joigne un temps dans Ouverture où le partage de tous les sentiments / histoire semble devenue monnaie courante. Une thématique autour du nécessaire jardin secret pour une bonne vie de couple ?
Autre nouvelle autour de cette thématique avec Migration où une partie de la population bascule pour assouvir ses pulsions sexuelles dans un univers parallèle. Chose acceptée au sein du couple, cela pose néanmoins des questions dans la construction de la famille… avec un rejet de la part des plus jeunes qui n’est pas sans faire référence au rejet de certains de nos modes de vie par nos propres enfants (notamment en termes d’exploitation des ressources de la planète). Puisqu’on parle écologie et ressource, la nouvelle Age de glace aborde cet aspect sous l’angle d’une famille qui exploite un peu trop les ressources récentes… Conciliation et écran de fumée sont à venir.
Moksha aborde des thématiques proches de la spiritualité, avec cet homme qui cherche à trouver l’illumination, au Népal (à croire que le futur ne change pas l’attrait de ce petit pays ;))… A préciser tout de même que la dimension technologique n’est pas oublié puisque cette illumination s’appuie sur le développement de substance particulière ;).
Reste une nouvelle un peu à part de mon point de vue, qui aborde l’évolution de la langue avec un mode exemple : Extraits du dictionnaire autorisé du nouveau monde apporte une touche d’étrangeté et de différence à un recueil riche !
Comme vous l’aurez compris, Alexander nous permet de naviguer dans un futur incertain où les technologies auront un impact sur tous les pans de nos vies…
Editions ActuSF (Mai 2022) – Collection Perles d’épice – 250 pages – 20,90 € – 9782376864837
Traduction : Hermine Hemon & Erwan Devos (Etats-Unis)
Titre Original : Children of the new world (2016)
maginez le futur…
Imaginez vous connecter instantanément aux réseaux sociaux par le biais d’implants…
Imaginez acheter un androïde pour élever vos enfants…
… ou bien élever des enfants virtuels plus vrais que nature…
Imaginez pouvoir visiter à l’infini vos souvenirs ou vivre entièrement en ligne…
… ou imaginez lutter pour votre survie dans un monde désormais recouvert d’une épaisse couche de glace.
Bienvenue dans le monde de demain. Il est déjà là.