La Dimension Heisenberg d’Eric Lysøe est le deuxième roman publié par la toute jeune maison d’édition Le Chant du Cygne. Le site nous prévient sur le côté sombre des textes qui ont vocation à être publié… Et il est avéré que ce roman d’Eric peut troubler un lecteur non averti.
Une plongée dans l’Allemagne nazie
Tout commence avec la rencontre de Jakob, le majordome de la famille Bohr. Nous sommes en pleine Seconde Guerre Mondiale, du côté de Copenhague.
Jakob vit sa vie tranquillement avec un poste qui convient totalement à ses ambitions et un petit côté dragueur qui lui permet de multiplier les conquêtes.
Mais voilà, un triple événement va changer la donne… La première est la rencontre de son maitre Niels Bohr avec le physicien allemand Werner Heisenberg, prix nobel de physique en 1932 et un des fondateurs de la mécanique quantique (pour en savoir un peu plus, rendez-vous sur Wikipedia). Les propos qui sont tenus entre les deux hommes mettent son employeur dans un trouble et une inquiétude surprenante : Werner Heisenberg aurait entre ses mains un artefact permettant de passer d’une dimension à l’autre.
Le deuxième événement est la cour assidue que le majordome mène auprès de la gouvernante Carlotta. En effet, le fiancé de la jeune femme, Jacobo, avait fui aux Etats-Unis et devait être rejoint par Carlotta. Mais, alors qu’il était présent dans les prisons en attendant de pouvoir débarqué, il a mystérieusement disparu, remplacé par le professeur chez qui il travaillait.
La dernière pierre qui fera basculer notre majordome, c’est la vision d’une infirmière blonde qui a capté son attention…
Pris par la curiosité et une envie d’aventure Jakob franchira le pas d’entrer de la Dimension Heisenberg, alors même qu’on lui avait donné l’ordre de détruire l’artefact.
La Dimension Heisenberg comme laboratoire du nazisme
Alors même qu’il bascule de l’autre côté du miroir, perdant dans l’aventure son auriculaire, il se retrouve dans le corps et donc la vie du savant nazi Rudy Schöndorf. Il découvrira que le savant entretient une liaison particulièrement étrange avec la femme d’un agent de la Gestapo et qu’il a à son service une esclave juive, Rachel.
Jakob va tenter au travers de son passage dans cette nouvelle dimension, de sauver en même temps Jacopo, dont la trajectoire est pour le moins étrange, tout en réussissant à donner le change sur ces connaissances scientifiques. Rapidement, il découvrira ce que les nazis préparent : des missiles et des bombes ainsi que les prémices des camps de concentration.
Loin d’imaginer ce que représentait les recherches des allemands, Jakob va vouloir contribuer à mettre un coup d’arrêt aux pratiques nazies. Mais c’est sans compter sur le corps qu’il occupe – et l’esprit surtout de son prédécesseur qui ne semble pas tout à fait d’accord pour abandonner totalement son corps.
Comme on s’en doute, l’histoire s’appuyant sur des éléments de l’histoire réelle et l’horreur de la période nazie, de nombreuses scènes sont tout simplement horrible, reflet d’une des périodes les plus sombres du dernier millénaire.
Les personnages sont au cœur du récit : Jakob bien sûr qui va devoir réussir à contrôler les pulsions de son hôte et réussir la mission qu’il s’est fixée. Cela l’obligera à être toujours sur le fil du rasoir, prêt ou pas loin de succomber aux plaisirs des nazis. Le personnage de Rachel est aussi bien construit : la jeune femme a du faire preuve d’une force de caractère et de détachement dans le même temps pour réussir à survivre en tant qu’esclave-juive. Son courage en ressort d’autant plus dans sa relation avec Jakob. Jacopo de son côté représente ces hommes qui ont décidé de profiter de leur pouvoir…
Un roman dur donc, dont l’intrigue est parfois sur un faux-rythme, d’aucun dirait même un peu lent mais la construction de ce monde alternatif n’est pas simple à expliquer. Certaines explications scientifiques, autour de la mécanique quantique, pouvant potentiellement rebuter un lecteur n’ayant aucune connaissance dans le domaine et ne s’y intéressant pas.
Pourtant, les pages s’enchaînent facilement, la complexité des personnages et leurs conflits internes renforçant l’intrigue.
Un mot sur l’objet ?
En ce qui concerne le livre en lui-même, il existe en trois format : le numérique, le format « standard » et le format de luxe. J’ai eu entre les mains le format standard et j’ai trouvé la mise en forme du roman intéressante : il est peu fréquent de voir le titre du roman tout comme le quatrième de couverture en travers de la couverture, dans le sens de la hauteur. De même, j’ai trouvé le qualité de très bonne qualité avec la contrepartie que le roman est un peu « lourd » à transporter.
Editions Le Chant du Signe (Janvier 2022) – 608 pages – 25€ – 9782957879014
Couverture : Damien Nagy
Maquette : Bénédicte Coudière
Qui peut se targuer d’être vraiment libre ?
Confrontés malgré nous à une situation historique particulière, nous subissons l’influence des autres et la pression de nos traumatismes. Nous résistons en vain à l’apparente dualité d’un monde qui nous impose de choisir un camp, et nos vies entrent si vivement en collision avec celles des autres que nous risquons à chaque instant de nous perdre.
La Dimension Heisenberg est une fiction historique sombre, qui s’ouvre sur la rencontre – bien réelle – entre Niels Bohr et Werner Heisenberg en septembre 1941. Ce roman mêle fantastique et science-fiction pour mettre en lumière les mécanismes élaborés par les individus dans l’espoir d’échapper à la violence.
Plongez dans un espace-temps inconnu organisé autour des recherches scientifiques nazies, un monde de faux-semblants où nul n’est ce qu’il prétend être. Une seule solution pour parvenir à se retrouver : laisser tomber les masques un à un et rassembler tout son courage pour briser ses chaînes.