Retrouvez l’actualité des littératures de l’imaginaire (Science-Fiction, Fantastique, Fantasy, et autre) ainsi que des interviews de celles et ceux qui les construisent.

Le Tango des ombres de Jean-François Seignol

Préfacé par Catherine Dufour, Le tango des ombres est un recueil de 5 nouvelles de Jean-François Seignol d’une originalité indiscutable. Pour des personnes qui, comme moi, ne connaissent pas le tango, les récits permettent de donner une autre dimension à cette dans impressionnante : jeu de l’invitation, de séduction et de relations aux archétypes bien marqués.

Le tango des ombres ou la danse de la résistance

Première nouvelle du recueil, et nous rejoignons l’enquête Emilio, un agent de la C-Sub, police luttant contre la résistance. Nous sommes ici clairement dans une dystopie dans laquelle la résistance semble réussir à déjouer toutes les traques de l’état tout en réussissant jour après jour des coups d’éclats.

Le jeune policier va tenter d’infiltrer un des groupes de danseurs et de danseuses et découvrira tous les codes qui régissent la société du Tango. Pour réussir à remplir les objectifs de sa mission, il devra non seulement apprendre la danse mais aussi se rapprocher des personnes qu’il jugera proche de la résistance.

La force de ce premier récit, qui a donné donc son titre au recueil, est en même temps de nous faire découvrir les codes tout en nous plongeant dans un futur où l’état perd ses moyens face à la résistance. Et bien au-delà de l’histoire, et je ne pourrais vous en dire plus, propose des moyens étranges pour répondre aux besoins des défenseurs de la liberté. On notera que la puissance de récit réside dans ce que représente ou tout au moins remplace le tango…

D’autres nouvelles mettant au centre le tango

Si cette première nouvelle est pour moi une réussite, les autres sont aussi de grande qualité, à commencer par la nuit où tu m’aimeras qui va nous plonger dans l’amour de plus en plus marqué d’un tanguero, et sur les conséquences de cette passion dévorante.

La troisième nouvelle Candombe est probablement la plus étrange… Les hommes colonisent d’autres planètes pour récupérer des matières premières et notamment, les matières issues des arbres tambours. Mais de plus en plus de bûcherons semblent réticents à détruire la flore locale, la faute probablement à ces lianes autour desquelles d’étranges rumeurs courent. C’est dans ce contexte qu’un biologiste doit s’assurer de la non-intelligence de ces arbres et de ces lianes, dans un contexte où, bien entendu, les autorités souhaitent poursuivre leur travail de sape et l’exploitation des ressources. Si le tango semble moins présent, la danse n’étant pas le cœur de la nouvelle, la musicalité de celle-ci reste centrale et donne une dimension particulière au récit.

Dans Paso Doble, nous rejoignons un jeune danseur de tango qui suspecte un doppelgänger de vouloir lui prendre sa place. En effet, de plus en plus souvent, des personnes le croisent dans des zones où il n’était pas présent, et lui-même commence à croiser son double, qu’il suspecte maléfique. La gestion de la conduite de la danse se révèlera un des enjeux de cette histoire, notamment dans une session de danse “Queer”.

Dernière nouvelle du recueil, Le flot, met en lumière deux scientifiques, amateur et amatrice de tango, alors même qu’ils vont rejoindre un trou noir du côté de Sagittarius A* et donc danser jusque la fin des temps. Cette nouvelle m’a donné l’impression d’un effet miroir avec le recueil lui-même par un partage du métier et de la science.

Pour conclure, un recueil original qui montre que Jean-François Seignol sait mêler passion et écriture, dans des récits originaux et agréables à lire.

Aethalidès (17 mars 2022) – Freaks – 248 pages18 € – 9782491517144

Un bal de tango qui dissimule un mouvement de résistance contre la dictature dans un monde rétrofuturiste, un enregistrement de Carlos Gardel en guise de philtre d’amour au cœur du Buenos Aires contemporain, des arbres-tambours d’une lointaine planète qui incitent les damnés de l’exoterre à la révolution, une histoire de doppelgänger mêlée de tango queer, et une danse extatique sur l’horizon d’un trou noir – autant de nouvelles et novellas qui forment Le Tango des ombres et qui ont pour point commun de célébrer l’insolite rencontre des deux passions de Jean-François Seignol : le tango argentin et les littératures de l’imaginaire.


Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.