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Rêveur zéro d’Elisa Beiram

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Rêveur zéro, paru à la rentrée scolaire aux éditions l’Atalante, est un premier roman d’Elisa Beiram. Un premier roman que nous pouvons déjà dire prometteur tant l’histoire qu’elle nous présente, au travers de 18 jours (et nuits), va nous permettre de découvrir un monde au prise avec une étrange maladie.

Et c’est peut-être le seul élément qu’on pourrait reprocher à cette parution, celle du mauvais timing, racontant la façon dont va réagir le monde et tenter de comprendre l’origine d’un mal, dans une réalité où nous y sommes malheureusement confrontée dans le cadre de cette damnée Covid…

Tout commence par un nombre certains d’événements qui se produisent par le monde et qui sont sans nul doute le résultat de rêves devenus réalité… Si cela peut se modéliser pour certains par la rencontre avec le Lapin Blanc d’Alice, pour d’autres le résultat est beaucoup plus dramatique et les morts vont se multiplier. D’où vient cette situation et comment l’expliquer ?

Elisa Beiram va nous amener sur la route de l’explication au travers de quelques personnages, qui seront autant de voix vivant les événements et qui se retrouvent liés d’une façon ou d’une autre à cette terrible épidémie.

Le premier personnage est Zahid, un jeune homme qui n’a pas de réel emploi (ou en tout cas il ne ressort pas), et qui va rejoindre le domicile de Victoire, sa sœur, après avoir quitté un laboratoire de Genève, dans lequel il était un des volontaires pour des expérimentations… Sur les rêves. Le point noir de son arrivée chez Victoire est d’un côté qu’il n’arrive pas à se souvenir la raison et les derniers éléments qui se sont passés avant qu’il ne quitte le laboratoire, mais surtout que l’ensemble du laboratoire – et des personnes participant à l’expérience – ont disparu… Enfin pas tout à fait, puisque le deuxième regard que nous avons sur cette crise sanitaire mondiale, est celui d’Alma, une neuroscientifique qui travaillait sur le même projet.

Alors que tous ses collègues ont disparu, la jeune femme a eu “la chance” d’avoir un problème à son domicile qui lui a épargné cette disparition. Disparition d’autant plus inquiétante que le lieu lui même a disparu, et la zone placée désormais sous le contrôle de l’armée pour tenter de retrouver les lieux. Son côté froid, clinique est probablement la raison pour laquelle je n’ai pas réussi à accrocher ou à trouver la personnage sympathique…

Dans le cercle restreint de la scientifique, on citera son frère, Jannis, travaillant pour une société “Big Data” qui va rapidement s’intéressé aux modèles de données pour essayer de trouver des schémas permettant d’expliquer l’origine et pourquoi pas prévoir la trajectoire de l’épidémie. Son rôle n’est pas sans faire penser d’ailleurs à ces mathématiciens et infectiologues qui se sont appuyés sur des données statistiques pour ne prédire les différentes vagues de confinement. Il va aussi représenter dans l’histoire cet aspect vie privée et exploitation des données personnelles sans qu’on ne sache réellement si c’est pour notre bien ou pas.

Les deux derniers personnages que nous allons suivre sont moins lié.e.s à l’épidémie elle-même qu’à ses conséquences et vont nous permettre de compléter le tableau complet. La première est l’infirmière Victoire qui va nous permettre d’appréhender la vision médicale et humaine surtout de cette épidémie. Encore une fois comme un écho à l’actualité, elle va se retrouver confronter à un afflux massif de malades, qu’elle va avoir du mal à rassurer tant elle se trouve dans l’ignorance complète des causes et des principaux risques pour elle… Pire, elle se doit de rassurer le plus possible des personnes qui viennent, persuadées d’être blessées alors qu’elles ne le sont pas réellement. Ce personnage représente pour moi la population qui subit la situation sans broncher, mettant son énergie au service du collectif et ce, indépendamment de ses propres besoins. Le personnage de Victoire est à mon sens le personnage le plus intéressant et le mieux construit de l’autrice, répercutant cette abnégation professionnelle jusque dans sa sphère familiale puisqu’elle fera tout pour aider son frère.

Et bien entendu, il faut le policier de l’histoire, Philipp, pour permettre de tisser entre eux tous les fils qui permettront de lier, de remonter les événements pour pouvoir délier in fine la situation.

C’est donc avec un vrai talent que l’autrice va nous faire naviguer dans cette étrange aventure, où le rêve va télescoper notre réalité et la rendre incertaine. Plus que la créativité de l’histoire, cette capacité et cette façon qu’à eu l’humanité de réagir est probablement l’axe le plus important du récit. Cette réaction de l’humanité face à une pandémie mondiale n’est malheureusement que trop d’actualité, et pourra freiner certainement des lecteurs ayant envie de s’aérer l’esprit. Pourtant, il serait vraiment dommage de passer à côté de ce premier roman qui arrive à maintenir un suspens de bout en bout.

Elisa Beiram signe donc un premier roman de qualité, riche et bien construit qui saura vous happer.

L’Atalante (Septembre 2020) – La Dentelle du Cygne – 448 pages – 23,90 € – 9791036000461
Couverture : Aurélien Police

Les deux têtes du Golden Gate émergent de leur nuage de brume, derrière la colline. Si seulement j’arrivais à rejoindre la ville, je serais en sécurité.
N’y a-t-il rien à faire qu’à subir le courroux de ce grand marshmallow ?
Mon bolide est éjecté hors de la scène. Il s’élève quelques instants, volette, volette, mais sa masse l’emporte sur les rêves et il est rappelé vers les flots, où se déversent les débordements rosâtres de la bête élastique. De plein fouet, je percute la surface. Le rideau tombe dans une gerbe d’éclaboussures, sous les applaudissements de la pluie mauve.

Dans un futur proche, une épidémie de rêves.
Ils se matérialisent dans la réalité. Leurs manifestations peuvent être badines, terrifiantes, ou simplement ridicules. Mais les pires d’entre elles provoquent de réels dégâts. Face à leur multiplication, l’ensemble de la société est mise à l’épreuve.


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