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Par delà l’horizon – Anthologie

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Parue en septembre 2021, l’anthologie Par delà l’horizon sous la direction de Sébastien Guillot nous invite à découvrir des auteurs et autrices de Science-Fiction autour de nouvelles bien différentes les unes des autres… Petit tour d’horizon sur ce recueil.

Médias sociaux et vies connectées

Ces deux sujets sont très présents autant dans nos vies que dans les nouvelles qui composent se recueil. Cela commence par la nouvelle d’Emilie Querbalec (Quitter les monts d’automne) qui ouvre le bal du recueil au travers de l’histoire du narrateur et de son amour… Un amour qui ne doit rien au hasard puisqu’il est appuyé et recommandé par l’application Meetiel. Les amateurs des applications de mise en relation amoureuse ne pourront pas dire qu’ils n’ont pas été prévenus.

L’impact des médias sociaux sur notre quotidien sera aussi un des thèmes de la nouvelle La solitude des fantômes d’Audrey Pleynet. Dans ce monde qui fait écho à l’annonce de la création de Multivers, nous allons suivre Evelyne et cet étrange monde où tout le monde est plongé dans le virtuel…

Ces deux premiers récits sont particulièrement intéressants par la projection qu’ils donnent de notre société, mais peut-être suis-je plus sensible que d’autre à ces thématiques. Restent que je les ai trouvé bien menées.

Une société en pleine évolution

Autre thématique que nous pouvons retrouver, autour de l’évolution de notre société, que nous retrouverons là encore dans plusieurs nouvelles… Si nous les prenons dans l’ordre, la première est celle de Pierre Bordage, Et le verbe se fit cher, dans laquelle un auteur se retrouve confronté à l’ultime affront du capitalisme… La mise sous brevet de termes de la langue, avec pour conséquence la nécessité d’un droit de péage. La nouvelle ferait sourire, si nos GAFA n’était pas capable d’en tirer des idées pour l’avenir. Et nous retrouvons le talent d’orateur de Pierre dans ce déroulé…

– La Ligue des auteurs n’a pas réagi ?

– Tout le monde se fout de la Ligue. Une grève des auteurs ne dérangerait pas grand monde. De toute façon, nous sommes bien trop individualistes pour organiser une action concertée.

Et le verbe se fit cher de Pierre Bordage.

Autre auteur qui s’aventure sur ce terrain, Christian Léourier nous propose de découvrir au travers de Le juge, le bot et l’ecureuil une réflexion sur l’humanité et les droits, dans cette nouvelle où un robot réclame un procès pour le meurtre qu’il a commis. Comme souvent avec Christian, cette nouvelle est emplie d’humanité et apporte une vraie réflexion autour de la thématique de l’évolution de la société.

Pour clore cette thématique, j’ajouterai la nouvelle de Ketty Steward, Quantique pour la liberté qui questionne sur le monde du travail et l’uberisation avec les histoires de Martha Wigner, RH en cours de licenciement, qui ne s’attendait pas à cette fin de travail et Sarah Lavigne, arrivant elle aussi en fin de mission mais habitué à travailler dans cette instabilité…. Avec en toile de fond bien sûr l’impact que cela a en terme de logement, sur l’utilité de tout à chacun pour la société.

L’espace n’est pas oublié !

Si la science-fiction “sociale” tient donc une part importante de ce recueil, les extra-terrestres et autres voyages dans l’espace ne sont pas non plus oubliés et nous retrouvons plusieurs nouvelles qui nous verrons voyager de l’espace à commencer par Le Pack de Laurent & Laure Kloetzer qui nous présente un jeu qui semble avoir un impact plus important que le seul amusement. La raison de ce jeu reste néanmoins obscur mais l’exercice est une réussite.

Autre expérience, celle proposé par Silène Edgar et Espoir. L’humanité a réussi à pourrir notre monde, mais un vaisseau, piloté par une I.A., est envoyé dans l’espace avec pour objectif de créer un nouvel Eden. Nous suivons donc cette installation avec probablement plus d’espoir que ce que nous voyons dans les autres textes. Cette nouvelle nous rappellera les failles de l’être humain avec les conséquences qui en découlent…

Toujours dans cette volonté de sauver l’humanité, le Projet Cérébrus de Floriane Soulas travaille à trouver une réponse à la mission qui permettrait d’atteindre cet objectif. Annabelle, chercheuse, fonde beaucoup d’espoir sur le sujet B104 dont les capacités sont surprenantes…

Deux nouvelles (Pa on et In der Höhle) de Luvan nous questionnent – en tout cas, ce fût ma perception – sur la nostalgie d’un lieu qu’on ne pourra plus rejoindre et aussi du rejet des autres.

La nouvelle Ce qui se tapit dans la tour de Chris Vuklisevic nous rapprochera (en fermeture de recueil) sur notre capacité d’humain à détruire notre environnement… Hannah vous accompagnera dans cette vision :).

Dernière nouvelle que je mettrais dans cette dimension “de l’espace”, même si elle se passe sur Terre, Ne vous inquiétez pas, on va s’y mettre de Jean-Laurent Del Socorro. L’arrivée en 2018 des premiers extra-terrestres, et des portes qui leur permettent de se déplacer, est de mon point de vue une des plus drôles du recueil, montrant la bêtise dont nous pouvons faire preuve.

La fin d’un temps

Le post-apo n’est bien sûr pas absent de ce recueil, évident si l’on sait que cela pourrait être notre futur (quel optimisme :)). Ce courant de la SF est marqué par la nouvelle de Stéphane Beauverger et Deimocratos dans laquelle une mère de famille va tenter de sauver son fils dans une forêt hostile, au risque de sa vie. Ce qui est intéressant n’est pas tant cette recherche que l’absence de sentiment qui semble être devenu la règle de vie, avec une ambiance bien pesante.

Les deux autres nouvelles de cette thématique ont été plus difficiles à percevoir de mon côté, tout d’abord celle de Michael Roch, l’heure où s’écrasent les zabèy où j’ai été gêné par le vocabulaire et peut-être l’histoire aussi, bref, je ne suis pas rentré dedans.

Celle de Léo Henry, J’ai senti venir l’avalanche dès les premiers flocons de Léo Henry nous plonge dans un monde enneigé, en compagnie de Virgile à la parole rare. Cette nouvelle a la particularité de nous plonger dans un silence impressionnant.

Les inclassables

Les quatre dernières nouvelles restent pour moi inclassables, même si deux d’entre elles sont parmi les plus intéressantes du recueil, à commencer par Cheloïdes de Jeanne-A Debats. Dans cette nouvelle, nous découvrons une autrice traumatisée par l’acte d’écrire qui se traduit par des souffrances inhumaines. Malgré tout, son infirmière va tenter de l’aider à continuer à exercer sa passion.

Deuxième nouvelle rentrant dans cette catégorie, avec pour moi un réel plaisir de lecture, Variation sur un poème de Borgès de Romain Lucazeau : vous allez pouvoir vivre une partie d’échec directement sur leur terrain avec toute la violence que cela implique.

Restent deux nouvelles dans ce recueil dont je n’ai pas encore parlé Carne de Lauriane Dufant et Golden age blues de Frédéric Jaccaud. J’avoue que je suis passé totalement au travers, et qu’il m’est bien difficile d’en parler ou même de la thématique… Ce n’est pas très clair pour moi.

Un recueil qui atteint l’objectif de nous faire découvrir différentes facettes de la Science-Fiction française contemporaine, avec cet effort sur la parité qu’il est important de souligner.

Editions ActuSF (22 octobre 2021) – Les Trois Souhaits – 509 pages – 21,90 € – 9782376863861
Couverture : Zaril

Rassemblant dix-neuf auteurs et autrices, Par-delà l’horizon est une anthologie ambitionnant de faire un point d’étape sur la SF hexagonale contemporaine.
Le futur, lointain ou très proche, les réseaux, l’hyper connexion, la technologie, les désastres écologiques, politiques, sociétaux… et surtout l’humain, sont au cœur de leurs histoires, de leur fables en permanence reliées à notre monde. Dix-neuf textes de science-fiction pour parler d’avenirs mais surtout de notre présent.
Avec Stéphane Beauverger, Pierre Bordage, Jeanne-A Debats, Jean-Laurent Del Socorro, Lauriane Dufant, Silène Edgar, Léo Henry, Frédéric Jaccaud, LL Kloetzer, Christian Léourier, Romain Lucazeau, luvan, Audrey Pleynet, Émilie Querbalec, Michael Roch, Floriane Soulas, Ketty Steward et Chris Vuklisevic.

Leur SF est moins de la Science-Fiction à l’ancienne, nourrie de savoirs scientifiques objectivables, qu’une nouvelle Science de la Fiction des littératures de l’imaginaire, (…) intensément connectée à notre réel pour tenter d’en exorciser les peurs, voire pour le réinventer, ce réel, “par- delà l’horizon” que l’on croyait si obstrué.

Ariel Kyrou

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