Deuxième roman de Léafar Izen publié aux éditions Albin Michel Imaginaire, Le Courage de l’Arbre voit Manchu illustrer avec beaucoup de talent cette parution très original.

Un arbre aux pouvoirs pratiquement magiques et une interconnexion de l’humanité

Avant de rentrer dans le détail de l’histoire, un petit point sur le monde que nous propose l’auteur.

L’humanité a réussi à se diffuser partout dans l’univers en s’appuyant sur un arbre étrange, appelé le PhytoÏde de Katz, du nom de son découvreur. Cette arbre a des particularités, et notamment celle de permettre d’apporter les matières premières qui permettront à la flore (et donc plus tard à la faune) d’apparaître. Le fonctionnement et les ressources de cet arbre restent totalement obscurs à l’humanité qui ne fait que profiter de cette aubaine pour terraformer autant que possible. On brûle de savoir comment cela fonctionne mais nous devrons acté que cela fonctionne sans en comprendre les ressorts.

Comment le Phytoïde est-il capable de faire apparaître de l’eau, sur une planète où l’oxygène et l’hydrogène sont radicalement absents ? Dans quels mondes cachés les racines du Phytoïdes de Kats se prolongent-elles ? D’où proviennent cette eau et toutes les substances qui suintent de l’arbre étrange ?

En parallèle de cette découverte, l’humanité a aussi développé sa technologie et la conquête des planètes et la capacité à maintenir une unité entre elles et rendu possible grâce à l’Egrégore, un réseau de communication s’appuyant sur des implants. Chacun·e des humain·e·s en est équipé pour permettre de rester, en quelque sorte, sur la même longueur d’onde. Au travers de leurs échanges, la communication est donc omniprésente et tout le monde semble se satisfaire de cet étrange vie où chacun·e peut rester en contact, au niveau le plus intime, avec le reste de la communauté.

Une chercheuse dans un monde isolé

Comme il est souvent coutume dans les romans de science-fiction, une règle existe pour protéger les populations qui n’ont pas conscience de ses avancées afin de ne pas troubler leur quotidien. Et dans la jungle du plateau d’Okodrée, une jeune ethnologue, Thyra est en train d’étudier une population primitive.

Pas n’importe quelle population puisqu’il s’agit d’un peuple qui est retourné de façon volontaire ou involontaire à l’état sauvage après un naufrage. La jeune femme a donc pour objectif d’étudier cette population et vient même de faire une découverte essentielle. Pourtant, cette découverte est entachée d’une entorse au règlement, ce qui la poussera à s’appuyer sur les services d’un jeune trafiquant en technologie, Roonis, pour éviter de se faire piéger.

Mais l’aventure tourne court et le vieil autochtone qu’elle a étudié est désormais la cible à abattre pour les instances égrégoriennes. Sommée d’être le bras armé qui tuera Humk, Thyra ne pourra se résoudre à obéir… S’engage alors une course contre le temps qui pourrait bien voir la fin de l’humanité et des planètes habitée.

Ce roman de Léafar Izen est le deuxième de l’auteur aux éditions Albin Michel Imaginaire après La Marche du Levant. L’univers que nous propose l’auteur est riche et oriente la réflexion et la trame de fond dans deux directions.

La première est bien entendu liée à la nature, au travers de cet étrange arbre qui est en mesure de synthétiser tout ce qui est utile à la vie, comme le fait notre propre faune. A une exception près bien entendu puisque nous connaissons les mécaniques sur notre Terre là où le Phytoïdes de Katz reste un mystère pour tout à chacun. Pourtant, nous voyons bien que Humk a une proximité avec l’Arbre puisqu’il ne cessera de dire tout au long du roman qu’il a été choisi et qu’il faut trouver la racine du mal.

De l’autre côté, nous avons cette hyperconnectivité et cette population qui ne cache rien aux autres… Même si Thyra a une tendance à vouloir masquer ses pensées, nous comprenons vite que cela n’est pas habituelle dans la population. C’est d’ailleurs un des éléments qui me semble intéressant dans la construction des personnages, notamment par le contrepoids de l’esprit de Roomis dont les pensées non seulement sont laissées ouvertes mais en plus choquent la jeune femme.

J’ai trouvé aussi un petit côté lutte des classes même si ce n’est pas le premier élément qui vient à l’esprit avec cette opposition entre Thyra et sa conception et son éducation qui la positionnent dès la naissance dans l’élite alors que Roonis doit se débrouiller avec ce qu’il a.

Néanmoins, pour revenir à l’histoire, nous voyons dans le récit de Léafar Izen une construction complexe d’un univers au bord de la rupture. Si la place de la nature est bien entendu au cœur du récit, les questionnements vont bien plus loin et sont intelligemment placé par l’auteur : qu’il s’agisse des risques liés à un emballement des Intelligences Artificielles ou aux limites de celles-ci ou encore de la manipulation politique.

Un space-opéra qui vous plongera dans un univers original et riche.

Albin Michel Imaginaire (20 avril 2022) – 416 pages – 21,90€ – 9782226458698
Couverture : Manchu

Grâce au Phytoïde De Katz, arbre prodigue et mystérieux, l’humanité a conquis une bonne partie de la galaxie. L’Égrégore, un réseau de communication tentaculaire, synchronise le temps des Hommes et fait vibrer leurs âmes sur-connectées au son du même diapason. Recluse dans la jungle artifi cielle du plateau d’Okodrée, Thyra, une jeune ethnologue, étudie un peuple retourné à l’état primitif à la suite du naufrage de ses lointains ancêtres. Aux antipodes de cette petite lune, dans la banlieue d’une cité minière, Roonis bricole et fait trafi c de divers gadgets « psyentifi ques ». La vie suit paisiblement son cours, jusqu’à ce que les énigmatiques instances égrégoriennes exigent l’impensable : le meurtre d’un vieil autochtone. Ce crime, la jeune chercheuse ne peut s’y résoudre. Accompagnée de Roonis, traquée par l’Egrégore, Thyra embarque alors dans une incroyable aventure interstellaire.