La Tour de Garde – Capitale du Sud – 3/3

Les contes suspendus de Guillaume Chamanadjian, toujours aux éditions Aux Forges de Vulcain, étaient sur ma pile à lire depuis fin avril… Je ne voulais pas me lancer trop tôt car je savais que le titre marquait la partie “Sud” de la trilogie de la Tour de Garde, sachant que la partie “Nord” par Claire Duvivier verra sa fin en octobre. Cela fait donc deux ans que nous suivions les aventures du jeune Nox, que nous avons découvert commis d’épicerie et dont le rôle n’a cessé de changer au fur et à mesure de l’histoire.

Rappel des faits…

Nous sommes donc côté Sud de l’aventure, et l’histoire de Nox a commencé d’une façon bien sordide puisqu’il a été retrouvé avec sa sœur Daphné dans un sous-sol, leur donnant ce nom de suceurs d’os et accueilli par le Duc Servaint, de la maison de la Couane. Les compétences que le Duc lui a permis de développer, de la négociation au meurtre, ont permis au jeune homme de se rendre indispensable, jusqu’à contribuer malgré lui à l’aggravation des tensions entre les différentes maisons de Gemina, aidé en cela par sa rivalité avec Daphné…

Mais je savais qu’une fois la parenthèse de l’hiver terminée, il me faudrait d’une manière ou d’une autre me replonger dans les affaires de ma cité.

Le jeune homme semble avoir pourtant plusieurs talents étranges, comme sentir la musicalité de la ville ou encore la capacité à basculer dans un monde secondaire, et violent, le Nihilo. Dans Trois lucioles, nous avons eu une accélération des événements avec une guerre fratricide entre les différentes maisons, l’arrivée de migrants et au final, la nécessité pour le jeune homme de fuir sa ville, pour rejoindre un lieu de son héritage : La Tour de Garde.

Certaines histoires n’ont pas de fin. Il y a la mort et il y a l’éternité. Certains contes ont seulement des débuts. Des commencements. Des origines. Le conte a une vie propre. Il vit et meurt. Il n’est rien sans le conteur. Et le conteur n’est rien tout court.

Son arrivée sur place vaut aussi pour rencontre d’Amalia, l’héroïne de Claire Duvivier, issue de Dehaven la Capitale du Nord… Nous sentons donc que les derniers rouages se mettent en place, puisque cette rencontre avait été annoncée dans Mort aux geais….

… et découverte d’une cité utopique

Le jeune Nox se retrouve donc à la fameuse Tour de Garde et il découvrira non seulement qu’il n’est pas seul mais aussi que le lieu en question n’est pas dans le meilleur état qui soit. Le rapprochement entre les deux séries de La Tour de Garde se voit ici beaucoup plus marqué qu’il ne l’a jamais été. Les événements qui ont frappé les deux capitales trouvent leurs explications et surtout, nous en apprenons plus sur ce fameux jeu de la Tour de Garde.

Désormais propriétaire d’un terrain, le jeune Nox va s’appuyer sur son ami Symètre pour prendre un nouveau départ. Cela passe par la reconstruction du lieu, déjà habitée par quelques nomades et surtout par Amalia et Yonas, dont on savait dès la fin de Mort aux Geais qu’ils avaient / allaient croiser la route de Nox. La récupération du lieu n’est pas sans poser de nombreuses questions puisque le lieu a été investi par les nomades comme dit, mais surtout parce que la fuite de Gemina n’a pas annihilé tous les problèmes de Nox.

Alors qu’il pensait que ces problèmes allaient prendre fin, il se rendra compte que sa sœur Daphné est loin de vouloir le laisser en paix. Contestation de son titre de propriété, menace par des tiers et autres vont jalonner le démarrage de cette nouvelle communauté. Nox et les siens vont devoir tout mettre en œuvre pour réussir à résister aux attaques directes ou fourbes de leurs adversaires. Et il est à noter que Nox prend ici une toute autre dimension !

Si la construction “physique” de la Tour de Garde est un élément structurant, le dimension sociale n’est pour autant pas laissée de côté : le nouveau propriétaire met un point d’honneur à développer un nouveau système de gouvernement, au centre duquel il se retrouve un peu malgré lui, qui va se montrer beaucoup plus ouverts et accueillant que la plupart des communautés. Chacun peut y trouver sa place, y trouver son rôle dans une espèce d’anarchie qui fonctionne. Les nouveaux et nouvelles arrivant.e.s se voient proposer d’intégrer le groupe, avec leurs talents et leurs compétences, et les réfugiés – d’où qu’ils viennent – sont intégrés. Cela passe aussi par une vraie intégration à la société, marqué par un repas de qualité, pour mieux se connaître.

Voilà… C’est fini

Du côté du Sud, l’histoire se termine. Nous avons découvert au travers des trois romans de ce cycle, nous avons pu découvrir Guillaume, dans un exercice qui doit être loin – de mon point de vue – d’être simple. Partant d’un personnage naïf, il a su le guider dans les méandres de la politique et des trahisons pour le mener jusqu’à une nouvelle société où le talent de chacun et chacune est mis au service du bien commun. La naïveté du personnage, ainsi que sa propension à se mettre au service des autres ont fait qu’il se retrouve bien entouré, permettant à son expérience de réussir.

Il est toujours difficile de finir un cycle, moitié d’un cycle plus vaste, sans tomber dans la facilité. Guillaume a su éviter tous les écueils, nous laissant triste de quitter Gemina tout en nous rappelant que nous avons vécu une expérience littéraire nouvelle.

Le roman de Guillaume est nécessairement imbriqué avec celui de Claire, il ne me reste plus qu’à attendre, avec beaucoup d’impatience, la conclusion de l’histoire de Dehaven… Pour octobre !

Aux Forges de Vulcain (Avril 2023) – 522 pages – 22 € – 9782373056952
Couverture : Elena Vieillard

Nox, ancien commis d’épicerie devenu négociateur de la maison de la Caouane, doit quitter la ville de Gemina suite à des événements terribles. Accompagné de son ami Symètre, il arrive enfin au domaine de la tour de Garde, où il veut construire un havre de paix, loin des machinations de la Cité. Des nouvelles amitiés et des rencontres inattendues lui permettront de se lancer dans cette aventure, mais l’influence de Gemina s’étend bien au-delà des enceintes de la ville, et Nox devra affronter une menace ancestrale afin de protéger son utopie.